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La Turquie abolit la peine de mort

dépêche de presse du 3 août 2002 - Associated Press - AP
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peine de mort / Turquie
ANKARA, Turquie -- Le Parlement turc a aboli dans la nuit de vendredi à samedi la peine de mort et octroyé davantage de droits aux minorités du pays, en particulier à la communauté kurde, dans un effort sans précédent pour devenir membre de l'Union européenne.

Les legislateurs ont voté à main levée en faveur d'un bouquet de 14 réformes après les avoir approuvées séparément tout au long de la nuit.

La Turquie est candidate à l'Union européenne depuis 1999 mais était jusqu'ici à la traîne en matières de réformes par rapport aux dizaines d'autres pays qui voudraient entrer dans l'UE. L'Union européenne doit remettre en octobre un rapport sur les progrès de la Turquie en matière de réformes. En décembre, l'UE espère pouvoir s'élargir à quelque 10 nouveaux pays.

Les élus se sont hâtés de légiférer au cours d'une cession d'urgence qui a également vu la programmation, plus tôt cette semaine, d'élections legislatives pour novembre, avec 18 mois d'avance. De nombreux élus craignaient que leurs collègues soient tellement obnubilés par les élections qu'ils ne se concentrent pas sur les réformes.

Le bouquet de réformes remplace la peine capitale par la prison à vie sans possibilité de remise. La peine de mort pourra toutefois encore être appliquée en temps de guerre.

Le parti nationaliste, qui tire un large soutien des familles de soldats qui ont combattu le Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK), s'était violemment opposé à la proposition de débat sur ces sujets, en particulier sur l'abolition de la peine de mort, craignant que ne soit remise en cause l'exécution du dirigeant kurde Abdullah Öcalan.

"Les familles des martyrs suivent ces procédures avec beaucoup d'attention", a averti le député nationaliste Mehmet Gul. "Un jour peut-être Abdullah Öcalan siégera parmi nous, parce que c'est à ça que cette loi va conduire", a-t-il redouté. "Soit vous rejetez cet amendement, soit vous dites clairement que vous comptez grâcier Öcalan".

D'autres partis ont souligné que ces réformes étaient cruciales si la Turquie voulait être acceptée au sein de l'Union Européenne. Bien que les tribunaux turcs prononcent régulièrement des condamnations à mort, Ankara n'a exécuté personne depuis 1984. Environ 50 détenus sont actuellement dans les couloirs de la mort. La peine capitale sera remplacée par la prison à vie, mais le délai de mise en application de ce vote n'a pas été précisé.

"Nous sommes heureux que la peine de mort soit en train d'être abolie", a déclaré le Premier ministre Bulent Ecevit vendredi après le vote. "Il est primordial que la porte de l'UE s'ouvre pour la Turquie".

Parmi les autres réformes approuvées figurent aussi la légalisation de programmes radiodiffusés et télévisé en langue kurde et dans d'autres langues régionales, autrefois interdits. Ces langues pourront aussi être enseignées dans les écoles turques.

Concernant l'enseignement du kurde, les réaction nationalistes ont également été très vives. "Nous ne laisserons pas ces terroristes descendre des montagnes dans nos villes pour participer à des cours," a déclaré le député Bozkurt Yasar Ozturk. "Au lieu d'éteindre un feu, nous l'alimentons".

La communauté kurde représente environ 12 millions de personnes en Turquie.

La liberté d'expression et le droit d'association sont également renforcés. Une mesure prévoit une condamnation plus sévère des personnes responsables de trafic humain. Une autre donne aux communautés minoritaires non-musulmanes comme les Grecs, les Arméniens ou les Juifs davantage de droits en matière de propriété immobilière, ou de lieux de cultes.
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