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La Cour européenne condamne la Turquie pour le procès inéquitable du leader kurde Ocalan

dépêche de presse du 12 mai 2005 - Agence mondiale d'information - AFP
Pays :
peine de mort / Turquie
La Cour européenne des droits de l'Homme (CEDH) a confirmé jeudi la condamnation de la Turquie pour procès inéquitable d'Abdullah Ocalan, condamné à mort en 1999, et a recommandé à Ankara d'organiser un nouveau procès du leader séparatiste kurde.

La peine du chef du parti des Travailleurs du Kurdistan (PKK, séparatiste) pour "trahison et séparatisme" avait été commuée en réclusion à perpétuité le 3 octobre 2002 après l'abolition de la peine de mort en Turquie, une des nombreuses mesures en matière de démocratie adoptées par ce pays dans le cadre de ses aspirations européennes.

La Grande chambre de la Cour, composée de 17 magistrats, a confirmé dans son arrêt -qui est définitif et sans appel- une première condamnation de la Turquie prononcée le 12 mars 2003 par une chambre de 7 juges.

Elle a notamment retenu, par onze voix contre six, la violation de l'article 6-1 (droit à un procès équitable) de la Convention européenne des droits de l'Homme, en estimant que la Cour de sûreté de l'Etat qui avait jugé Ocalan manquait d'indépendance et d'impartialité en raison de la présence en son sein d'un magistrat militaire.

Sur ce point, la Grande chambre à fait un pas de plus dans son arrêt en suggérant "un nouveau procès ou une réouverture de la procédure".

En cas de condamnation pour le non respect des conditions "d'indépendance et d'impartialité exigées par la Convention, un nouveau procès ou une réouverture de la procédure, à la demande de l'intéressé, représente en principe un moyen approprié de redresser la violation constatée", a-t-elle souligné.

En réaction, le vice-président du parti au pouvoir, le parti de la Justice et du Développement (AKP), a affirmé que son pays respecterait les principes de l'Etat de droit et devrait s'engager à amender ses lois pour rejuger le chef séparatiste kurde.

"La République de Turquie est un Etat de droit ouvert et s'engagera à faire le nécessaire demandé par les lois", a déclaré Dengir Mir Mehmet Firat en laissant toutefois entendre que même s'il était rejugé, le "chef terroriste" écoperait de la même peine.

Dans son arrêt, la Cour a par ailleurs sanctionné les modalités de la garde à vue du leader kurde (article 5), notamment sa durée excessive et a retenu une violation de l'article 3 (interdiction de la torture) du fait que la condamnation à mort a été prononcée à l'issue d'un procès inéquitable.

Les avocats d'Abdullah Ocalan ont exprimé leur satisfaction après la lecture de l'arrêt, précisant qu'ils vont consulter leur client qui purge sa peine sur l'île-prison d'Imrali, dans le nord-ouest de la Turquie.

"Nous allons discuter avec notre client. Il est probable qu'il soit d'accord. Il devrait y avoir un nouveau procès", a indiqué aux journalistes Me Marc Muller, l'un de ses avocats.

"Si la Turquie veut rejoindre la famille européenne elle doit respecter les règles minimales qui s'appliquent à tout être humain", a-t-il ajouté. La Turquie doit entamer le 3 octobre prochain les négociations en vue de son adhésion à l'UE, un processus qui devrait durer au moins une dizaine d'années.

Le PKK, créé en 1978, est considéré comme une organisation terroriste par la Turquie et nombre de pays occidentaux, dont les Etats-Unis. Il a mené entre 1984 et 1999 une lutte armée contre le pouvoir central d'Ankara pour la création d'un Etat kurde indépendant dans le Sud-Est anatolien qui a fait près de 37.000 morts.

Environ 200 partisans du PKK ont manifesté pendant la lecture de l'arrêt devant le bâtiment de la Cour en scandant "libérez Ocalan" et en brandissant des drapeaux bleu et jaune ornés du portrait de leur leader.
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