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Déclaration du ministre Cannon sur l'Iran, prononcée devant la Chambre des communes

No 68
communiqué de presse du 17 février 2011 - Ministères canadiens - Affaires mondiales Canada - Canada
Pays :
Ce qui suit est la transcription révisée d'une déclaration du ministre des Affaires étrangères, l'honorable Lawrence Cannon, sur la situation en Iran. La déclaration a été faite devant la Chambre des communes à 19 h 15, le mercredi 16 février 2011 :

"Madame la présidente, il y a un an et demi, un extraordinaire mouvement populaire pacifique est descendu dans les rues en Iran. Ce mouvement rejetait les résultats d'élections qui avaient manifestement été manipulées et revendiquait des réformes radicales. Des millions d'Iraniens ont envahi les rues pendant les mois de juin et de juillet 2009, bravant la répression, l'intimidation, les arrestations et la violence des autorités iraniennes actuellement en place.

Pendant que nous assistions aux transformations démocratiques qui ont eu lieu en Tunisie et en Égypte au cours des dernières semaines, nous nous sommes souvenus que l'Iran avait donné au Moyen-Orient un exemple de courage et d'espoir. Les Canadiens, comme les autres membres de la communauté internationale, avaient promis de ne jamais oublier la bravoure dont avaient fait preuve les militants iraniens.

Où se trouvent les dirigeants du Mouvement vert aujourd'hui? Malheureusement, pendant que les situations en Égypte et en Tunisie lançaient un message d'espoir, les événements en Iran exposent un règne d'oppression. Aujourd'hui, les militants de 2009 sont assignés à résidence, leurs lignes téléphoniques ont été coupées et des agents de sécurité surveillent leurs maisons. Parmi ces dirigeants figurent d'anciens hauts dirigeants de l'Iran, qui furent soit premier ministre du pays [Mir Hossein Mousavi, premier ministre de 1981 à 1989], soit président du parlement iranien [Mehdi Karroubi, président de 1989 à 1992 et de nouveau de 2000 à 2004] soit président du pays [Akbar Hashemi Rafsanjani, président de 1993 à 1997]. En ce moment même, le corps judiciaire et les membres du parlement iranien réclament leur arrestation, voire leur exécution pour avoir " corrompu la terre ”.

Le gouvernement et la Chambre des communes ont toujours dénoncé le mépris flagrant des autorités iraniennes à l'égard des droits les plus fondamentaux de la personne et leurs nombreuses violations de ces mêmes droits, et continueront à le faire. Le gouvernement est très préoccupé par les mesures répressives prises par les autorités iraniennes, pas plus tard que cette semaine, contre des manifestants pacifiques à Téhéran. L'hypocrisie des autorités iraniennes, qui appuient la transition vers une Égypte plus démocratique, mais qui répriment pareille demande pour l'Iran, est tout à fait inacceptable. Les forces de sécurité iraniennes ont utilisé du gaz lacrymogène, des matraques et des vaporisateurs de poivre contre des manifestants pacifiques, ce qui constitue une violation flagrante du droit à la liberté d'expression et de réunion.

Le gouvernement continuera à insister auprès des autorités iraniennes afin qu'elles autorisent les rassemblements pacifiques et qu'elles libèrent immédiatement tous les manifestants détenus sans motifs valables. De plus, il continuera à rappeler l'Iran à l'ordre pour ses violations répétées des droits de la personne ainsi que du droit à la libre expression et à la liberté de réunion.

Malheureusement, les événements récents s'inscrivent dans une longue tradition. Nous n'oublierons pas que bon nombre de jeunes gens arrêtés durant la manifestation de 2009 ont été emprisonnés dans la tristement célèbre prison de Kahrizak où ils ont été sauvagement battus et entassés, par dizaines, dans de petites cellules sans ventilation. Au moins trois d'entre eux sont morts à la suite des coups reçus ou par asphyxie, alors que d'autres auraient été violés par leurs geôliers. Le parlement iranien lui-même [le Majlis] a enquêté sur ces incidents et conclu que les détenus avaient effectivement subi des sévices, notamment de la part de Saeed Mortazavi, l'homme impliqué dans le meurtre de la journaliste canadienne Zahra Kazemi en 2003. Cependant, en dépit des conclusions du Majlis, le monde attend toujours que les auteurs des crimes commis dans cette prison soient traduits en justice.

Les activistes du Mouvement vert ont disparu de la société iranienne. Des intellectuels, des étudiants, des hauts fonctionnaires et des religieux qui s'étaient joints à la lutte pour la liberté et la réforme croupissent maintenant en prison ou ont été tués. Bon nombre d'entre eux avaient été forcés de témoigner dans des procès télévisés humiliants, où ils ont avoué leurs soi-disant crimes, de toute évidence sous la contrainte. Ils sont nombreux à s'être fait imposer des peines sévères par les tribunaux iraniens au terme d'un processus fort douteux.

Toutefois, dans ce genre de situations, le mot " nombreux " peut masquer des tragédies et des souffrances individuelles. J'aimerais porter à l'attention de la Chambre quelques-uns de ces cas :

Jafar Panahi, le talentueux cinéaste honoré en septembre dernier au Festival international du film de Toronto, a été condamné à six ans de prison et s'est vu interdire la réalisation de films pendant 20 ans.

Mohammad Ali Abtahi, un religieux respecté et ancien sous-ministre de la Culture et vice-président de l'Iran, a été détenu pendant 160 jours.

Mostafa Tajzadeh, un ancien sous-ministre, a été détenu pendant dix mois, puis arrêté de nouveau pour avoir déclaré que les élections de 2009 étaient truquées.

Ibrahim Yazdi, ancien chef politique et militant, a été arrêté en juin 2009, puis de nouveau en octobre 2010. Emprisonné et dans un état de santé précaire, la date de son procès a apparemment été reportée.

Je pourrais citer bien d'autres cas encore.

Les courageux Iraniens qui se sont battus pour la démocratie en 2009 font maintenant face à de lourdes conséquences, notamment à la peine de mort.

Le 29 janvier [2011], la citoyenne irano-néerlandaise Zahra Bahrami a été exécutée sur le fondement d'accusations douteuses liées à la drogue qui ont été portées après son arrestation lors d'une manifestation contre M. Ahmadinejad.

Le 24 janvier, Jafar Kazemi et Mohammad Ali Haj Aghaei, qui avaient été arrêtés lors des manifestations de 2009, ont été exécutés après avoir été accusés d'avoir des liens avec un groupe terroriste.

Le gouvernement du Canada, qui est très inquiet, croit que cette tendance se maintiendra et que le corps judiciaire iranien prononcera des peines de mort à l'encontre d'autres personnes qui s'étaient rassemblées pour manifester pacifiquement leur opposition démocratique. Le gouvernement craint aussi que la centaine de civils qui auraient été arrêtés lors des manifestations du 14 février dernier ne subissent le même traitement cruel, imposé sans aucune transparence.

D'autres militants arrêtés à la suite des élections de 2009 subissent de dures sanctions, dont des châtiments corporels, pour avoir participé à des protestations pacifiques et commis de pseudo-infractions passibles de peine de mort. Mentionnons quelques-unes des nombreuses personnes persécutées par un gouvernement qui ne respecte aucunement les droits démocratiques fondamentaux : Mehdi Aghdam, un jeune militant condamné à une peine d'emprisonnement de 6 ans pour avoir participé à des manifestations; Emad Bahavar, un étudiant militant ayant reçu une peine d'emprisonnement de 10 ans et une interdiction de participation à toute activité politique pendant 10 ans; Amir Khorram, un jeune militant condamné à 7 ans de prison et à 74 coups de fouet; Sarah Tavassoli, une jeune militante ayant reçu une peine de 6 ans de prison et de 74 coups de fouet; Behzad Arabgol, un travailleur du bâtiment père de deux jeunes enfants emprisonné pour 6 ans en raison de sa participation à une manifestation; Shiva Nazar-Ahari, une militante pour les droits des femmes à qui on a imposé une peine de 4 ans de prison et de 74 coups de fouet.

Ces terribles sanctions imposées à des personnes qui ont exercé leurs droits universels de liberté d'expression et de réunion révoltent toute personne sensée, où qu'elle soit. Ces abus doivent cesser.

Le gouvernement du Canada a dénoncé la répression qui a suivi les élections de juin 2009. Depuis, nous continuons de dénoncer la répression violente et systématique des manifestations pacifiques. Ces violations injustifiées des droits de la personne continueront d'être un élément crucial de la politique étrangère du Canada à l'égard de l'Iran.

Notre position restera ferme, nous continuerons de défendre haut et fort nos principes et d'exercer notre leadership sur la scène internationale tant que les dirigeants de l'Iran utiliseront la répression et que les Iraniens ne pourront pas jouir des droits et des libertés que nous considérons universels et inaliénables."
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