Plan du site

Première double exécution aux États-Unis depuis l'an 2000

dépêche de presse du 25 avril 2017 - Agence mondiale d'information - AFP
Pays :
peine de mort / Arkansas
Thèmes :
Jack Jones Marcel Williams
(Agence France-Presse) Washington - L'Arkansas a procédé lundi soir à une double exécution controversée de deux condamnés à mort, une première aux États-Unis depuis 17 ans.

Jack Jones et Marcel Williams, condamnés de façon distincte dans les années 1990 pour viol et meurtre, ont chacun reçu une injection létale, a annoncé Leslie Rutledge, procureure générale de cet État du sud du pays.

Leurs avocats ont bataillé jusqu'aux dernières minutes, avant de voir leurs ultimes recours judiciaires rejetés.

Le décès des deux hommes s'inscrit dans un calendrier très critiqué d'exécutions accélérées en Arkansas, en raison de la proche péremption d'une substance utilisée dans les injections mortelles.

Jones, 52 ans, et Williams, 46 ans, sont les deuxième et troisième détenus mis à mort en avril dans cet État qui avait initialement prévu d'exécuter huit prisonniers en 11 jours.

Ce programme d'exécutions précipitées a été la cible de multiples assignations en justice et d'une mobilisation internationale des opposants à la peine de mort.

La bataille judiciaire s'est pour l'heure soldée par la suspension de quatre des exécutions prévues, une cinquième ayant elle été pratiquée la semaine dernière.

Outre les deux exécutions réalisées lundi, une dernière est prévue jeudi.

Le dernier État américain à avoir exécuté deux détenus en un jour était le Texas, le 9 août 2000.

Juste après la mort de Jack Jones, les avocats de Marcel Williams ont affirmé que cette première exécution ne s'était pas bien déroulée.


Niveau d'inconscience controversé

Les agents pénitentiaires ont d'abord selon eux échoué à poser un cathéter central au niveau du cou de Jones, étant forcés de se rabattre sur la pose de deux voies veineuses périphériques dans les bras du détenu.

Six à sept minutes après l'injection du premier produit censé plonger dans une profonde inconscience le prisonnier, celui-ci «remuait ses lèvres et luttait pour respirer», ont-ils écrit dans leur recours.

La juge fédérale Kristine Baker a alors pris une injonction de suspension temporaire de la deuxième exécution, le temps d'examiner la validité de ces arguments. L'État a de son côté dénoncé des affirmations «complètement infondées».

Une fois l'injonction levée, Marcel Williams a été mis à mort tandis que des militants contre la peine capitale tenaient une veillée funèbre à l'extérieur de la prison.

L'Arkansas a beau avoir servi de tremplin à l'ancien président démocrate Bill Clinton, l'État s'est ancré ces dernières années dans le camp républicain.

Reste qu'en annonçant fin février son intention de procéder à quatre fois deux exécutions à un rythme inédit dans l'histoire américaine, le gouverneur conservateur Asa Hutchinson a déclenché une vive polémique.

Ce projet d'exécutions «à la chaîne» a été dénoncé par l'Union européenne, Amnesty International, Human Rights Watch ou encore par le maître du roman noir John Grisham, natif de l'Arkansas.

La controverse n'a toutefois pas agité les cercles politiques à Washington ni pris de l'ampleur, la question de la peine de mort relevant des États sans véritablement susciter de débat national.

Plus largement, un moratoire ou une abolition de la peine capitale en Amérique n'est pas d'actualité, la Cour suprême ayant récemment retrouvé une majorité conservatrice. Les exécutions sont malgré tout en déclin, avec une carence des produits servant aux injections mortelles.


Substance létale critiquée

Les défenseurs des condamnés affirmaient qu'une double exécution ne pouvait qu'engendrer un stress dangereux chez les agents pénitentiaires chargés de l'acte. Avant jeudi, l'Arkansas n'avait procédé à aucune exécution depuis 2005.

Les injections létales sont composées de trois produits administrés l'un après l'autre. Celui arrivant à expiration le 30 avril, le midazolam, est un anxiolytique accusé de plonger insuffisamment dans l'inconscience le condamné, entraînant pour lui un risque de grave douleur.

Jack Jones avait violé et tué une femme de 34 ans, Mary Phillips, et quasiment battu à mort sa petite fille, Lacey. Le mari de la victime, James Phillips, avait confié qu'il ne serait pas perturbé de voir expirer le meurtrier de son épouse.

«Cela fait presque 22 ans que j'attends que justice soit rendue. C'est tout ce que je demande», avait-il déclaré à une chaîne télévisée du réseau CBS.

Juste avant de mourir, Jones a remis une lettre manuscrite, incluant la phrase suivante: «Aucun mot ne saurait exprimer complètement mon remords pour la peine que j'ai causée».

Marcel Williams a lui aussi violé et étranglé une mère de famille, Stacy Errickson, qui était âgée de 22 ans. Il a refusé de s'exprimer.
(Sébastien Blanc)
Partager…