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Le problème du mauvais avocat devant la justice américaine

dépêche de presse du 30 octobre 2017 - Agence mondiale d'information - AFP
Pays :
peine de mort / Texas
En Amérique, la peine de mort est infligée "non pas aux pires meurtriers, mais à ceux qui ont les pires avocats", selon le pénaliste Stephen Bright: un dossier examiné lundi par la Cour suprême vient illustrer cette dérive du principe d'égalité des citoyens devant la justice.

Carlos Ayestas, un homme d'origine hondurienne, a été condamné à la peine capitale pour avoir, en compagnie de deux complices, ligoté et battu à mort une femme de 67 ans dont ils cambriolaient le domicile en 1995.

Selon ses défenseurs, le meurtrier avait un lourd passif: alcoolique depuis l'adolescence, toxicomane, victime de traumatismes crâniens, il souffrait de graves troubles psychiques.

Il a été jugé dans le comté de Harris, au Texas, qui détient le record absolu des exécutions aux Etats-Unis. A lui seul ce comté a davantage exécuté que chacun des autres Etats américains appliquant la peine de mort.

C'est la troisième fois en un an qu'un dossier concernant le comté de Harris, réputé ultra-répressif, arrive devant la Cour suprême des Etats-Unis, pays pourtant composé de quelque 3.000 comtés.

"Cela montre qu'il y a là un problème", commente le juriste Robert Dunham: "De comté faisant figure d'exception, on est en train de passer à un comté hors-la-loi".

Le code pénal américain stipule qu'un accusé sans ressources a droit à un avocat, à des moyens "nécessaires raisonnablement" pour sa défense, notamment pour financer des actes d'enquête susceptibles d'établir des circonstances atténuant la gravité de ses actes.

Dans le cas de M. Ayestas, "l'avocat à son procès n'a rien fait durant un an et demi, jusqu'à environ un mois avant l'audience", souligne Lee Kovarsky, chargé de plaider pour le prisonnier à la Cour suprême.

- Pas d'expertise mentale -

"Un avocat sérieux doit vérifier l'histoire de son client sur le plan social, obtenir une expertise de sa santé mentale et rechercher quelle est la meilleure circonstance atténuante à exploiter. Rien de tout cela ne s'est produit".

Une fois établie la culpabilité de Carlos Ayestas, ajoute-t-il, il aurait fallu se poser la question suivante avant de fixer la peine: "Fait-il partie des pires parmi les pires, mérite-t-il la peine de mort au regard des circonstances de sa vie?"

Comme le rappelle Brandon Garrett, professeur à la Virginia School of Law, "le premier rôle de l'avocat d'un accusé encourant la peine capitale est de présenter au jury une raison de ne pas le condamner à mort".

Mais, pour M. Ayestas, "rien de surprenant qu'il n'ait fallu que 12 minutes au jury pour décider de le condamner à mort, ils n'avaient aucune raison de ne pas le faire".

Pour réparer les défenses défaillantes assurées par un avocat, il existe aux Etats-Unis la procédure d'habeas corpus, qui permet à une personne détenue de contester la condamnation prononcée contre elle au motif que cette condamnation a été obtenue en violation de ses droits constitutionnels.

Mais, au Texas, la loi complique les choses pour les détenus, imposant aux avocats de prouver de façon préliminaire que la sentence aurait été différente si l'accusé avait été mieux représenté.

- Bien défendre a un coût -

Or, explique l'experte Emily Olson-Gault, "pour défendre les condamnés à mort il faut une équipe. Un avocat tout seul n'est pas suffisant", d'autant plus sans moyens financiers.

En clair, il faut des travailleurs sociaux établissant une relation de confiance avec le détenu, pour que celui-ci se confie sur les éventuels traumatismes qu'il a subis, il faut des enquêteurs, il faut de l'argent pour des expertises médicales: autant d'éléments que le Texas a refusés dans le cas de M. Ayestas.

Ses avocats espèrent donc que la Cour suprême à Washington réaffirmera avec force que les arguments de défense dont Carlos Ayestas a été privé étaient "nécessaires raisonnablement" pour lui trouver d'éventuelles circonstances atténuantes.

L'expérience prouve notamment que les jurys sont sensibles aux arguments de santé mentale, même face aux crimes les plus barbares.

Ainsi James Holmes, auteur d'un carnage en 2012 dans un cinéma dans le Colorado où il avait ouvert le feu sur les spectateurs, a échappé à la peine de mort, présentant des signes de démence.
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