Plan du site

Assassinat de deux Scandinaves au Maroc: peine de mort requise contre trois accusés

dépêche de presse du 27 juin 2019 - Agence mondiale d'information - AFP
Pays :
peine de mort / Maroc
L'accusation a requis jeudi la peine de mort pour les trois "monstres sanguinaires" qui ont avoué devant un tribunal antiterroriste marocain avoir décapité deux jeunes Scandinaves au nom du groupe jihadiste Etat islamique (EI).

Louisa Vesterager Jespersen, une étudiante danoise de 24 ans, et son amie Maren Ueland, une Norvégienne de 28 ans, ont été tuées alors qu'elles campaient sur un site isolé dans le Haut-Atlas, une région montagneuse du sud du Maroc prisée des randonneurs. Le rapport d'autopsie a dénombré 23 blessures sur le corps de l'une et sept sur celui de l'autre.

Les trois hommes ayant avoué le crime --Abdessamad Ejjoud, un marchand ambulant de 25 ans considéré comme le cerveau du groupe, Younes Ouaziyad, un menuisier de 27 ans, et Rachid Afatti, 33 ans, qui avait filmé la scène avec son téléphone portable-- sont restés impassibles à l'énoncé du réquisitoire, devant le tribunal antiterroriste de Salé, près de Rabat.

Des peines allant de quinze ans de prison à la perpétuité ont été requises contre les 20 autres accusés marocains, âgés de 20 à 51 ans, tous issus de milieux modestes et vivant dans des quartiers déshérités de Marrakech (centre), la capitale touristique du Maroc.

Le procureur a par ailleurs réclamé 20 ans de prison contre le seul étranger du groupe, Kevin Zoller Guervos, un Hispano-suisse converti à l'islam et accusé d'avoir appris aux principaux suspects à utiliser une messagerie cryptée ainsi que de "les avoir entraînés au tir".

La peine à perpétuité concerne Abderrahim Khayali, un plombier de 33 ans, qui avait accompagné le trio ayant reconnu le meurtre dans le Haut-Atlas mais était parti avant la tuerie chercher une planque à Marrakech, après six tentatives infructueuses pour tuer d'autres randonneurs.

Des images de la décapitation avaient été postées sur les réseaux sociaux, avant la diffusion d'une vidéo montrant les quatre hommes faire allégeance à l'EI - qui n'a jamais revendiqué le double assassinat.

- "Défaillances" -

Le procureur a accusé le groupe d'avoir fomenté plusieurs actions "terroristes" avortées contre différentes cibles avant le double assassinat. Il a aussi souligné que tous les accusés, sauf trois, avaient reconnu être des partisans de l'EI.

Avant de requérir la peine de mort contre les trois principaux accusés, le procureur a cité une sourate du Coran: "Celui qui tue son prochain doit être tué".

Les condamnations à la peine capitale sont toujours prononcées au Maroc, mais un moratoire est appliqué de facto depuis 1993 et son abolition fait débat, la nouvelle Constitution adoptée en 2011 prévoyant explicitement le "droit à la vie".

Des pétitions réclamant la peine de mort pour les assassins des deux Scandinaves ont circulé sur Internet, le sort de Louisa et Maren ayant suscité une grande émotion.

Les avocats de la partie civile, parlant au nom de la famille de Louisa, ont pour leur part pointé des "défaillances" des services de l'Etat marocain tout en dénonçant l'influence des écoles coraniques du chef religieux marocain, cheikh Mohamed al-Maghraoui.

Le chef présumé du groupe Abdessamad Ejjoud avait été condamné dans le passé pour avoir tenté de rejoindre l'EI en Syrie.

Il a "épousé les idéaux jihadistes en prison", "bénéficié d'une remise de peine" et réuni à Marrakech des "frères" rencontrés en détention ou dans son quartier, sans être jamais inquiété par les autorités, a affirmé Me Khaled El Fataoui.

Le groupe comptait des imams, des "fonctionnaires" qui prêchaient à rebours de la ligne officielle de leur hiérarchie prônant un islam tolérant et modéré, a-t-il ajouté.

Pour éclaircir le contexte de l'embrigadement du groupe, la partie civile voulait que le cheikh Mohamed al-Maghraoui, mis en cause par un des prévenus, soit auditionné, mais sa demande a été rejetée.

Ses écoles avaient été fermées en 2010 sur décision judiciaire puis rouvertes en 2012 par le ministre de la Justice de l'époque Mustapha Ramid, lequel avait regretté dans un discours que "Marrakech devienne une destination pour des gens du monde entier qui viennent commettre des péchés", selon les avocats de la partie civile.

La prochaine audience aura lieu le 11 juillet. L'avocat de l'Etat doit plaider pour répondre aux parties civiles, avant ceux de la défense. La parole sera donnée une dernière fois aux accusés avant que les juges ne se retirent pour délibérer.
Partager…