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Avocats et proches de femmes de jihadistes dénoncent de possibles procès en Irak

dépêche de presse du 16 octobre 2019 - Agence mondiale d'information - AFP
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Paris, 16 oct 2019 (AFP) - Avocats et familles de femmes françaises de jihadistes détenues par les Kurdes en Syrie redoutent leurs transfert et jugement en Irak, après que le ministre des Affaires étrangères Jean-Yves Le Drian a évoqué mercredi cette option.
Plusieurs camps où sont détenues femmes et enfants de combattants du groupe État islamique (EI) se retrouvent actuellement dans ou à proximité de zones de combats, après l'offensive lancée le 9 octobre par la Turquie contre la milice kurde des Unités de protection du peuple (YPG) dans le nord de la Syrie.

Interrogé sur BFMTV sur leur rapatriement d'urgence en France, demandé par leurs familles, Jean-Yves Le Drian a exclu tout retour de femmes. Selon leurs familles et leurs avocats, une centaine de mères et environ 200 enfants français, aux trois quarts âgés de moins de 5 ans, sont détenus en Syrie.

Les femmes françaises venues rejoindre l'EI, notamment depuis 2015, "savent ce qu'elles font, elles ne vont pas faire du tourisme. Ce sont des combattantes, contre la France. (...) Elles doivent être jugées", a déclaré le ministre, en estimant sur ce point que des procès en Irak seraient une "bonne opportunité".

Or pour Marie Dosé, avocate de plusieurs familles, "un transfert de ces femmes et de ces enfants vers l'Irak constituerait la pire des options et marquerait l'abandon définitif de nos valeurs républicaines".

M. Le Drian "assume publiquement un contrat de sous-traitance judiciaire avec un pays, l'Irak, qui réclame des millions de dollars pour prendre judiciairement en charge nos ressortissants" et condamne à mort après des "simulacres de procès", dénonce Mme Dosé dans un communiqué.

"Certaines (Françaises) ont été emmenées en Syrie par leurs parents alors qu'elles étaient mineures, d'autres cherchent à fuir Daech depuis des années, d'autres encore ont été embrigadées en quelques semaines, et toutes celles que je défends ne demandent qu'une chose: que notre pays les condamne pour ce qu'elles ont fait", affirme-t-elle.

Le Collectif des familles unies, qui regroupe des proches de Français partis rejoindre l'EI en Irak et Syrie, craint que la France ne rétablisse "la peine de mort et la torture par procuration" en refusant de les rapatrier.

"La politique de +non-rapatriement+ que semble continuer à défendre M. Le Drian est irresponsable d'un point de vue sécuritaire (...) et ignoble d'un point de vue humanitaire vis-à-vis d'enfants français innocents", estime ce collectif.

L'ONG de défense des droits de l'Homme Human Rights Watch (HRW) a de son côté estimé dans un communiqué que "quiconque" favorisait le transfert vers l'Irak de personnes soupçonnées d'appartenir à l'EI pourrait "contribuer à de graves abus" au vu des "risques de torture, de simulacres de procès ou de condamnations à mort".

Au lieu de chercher à faire juger leurs ressortissants en Irak, la France, mais aussi le Danemark, l'Allemagne, les Pays-Bas, la Suède et le Royaume-Uni devraient plutôt les rapatrier et les juger eux-mêmes "dans le respect des normes internationales", a ajouté Belkis Wille, chercheuse sur l'Irak à HRW.

Environ 12.000 combattants de l'organisation État islamique (EI), dont 2.500 à 3.000 étrangers, sont détenus dans les prisons sous contrôle des Kurdes, selon des sources kurdes.
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