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La Cour suprême américaine interdit de condamner à mort les violeurs d'enfants

dépêche de presse du 25 juin 2008 - Agence mondiale d'information - AFP
Pays :
peine de mort / Etats-Unis
WASHINGTON (AFP) — La Cour suprême américaine a invalidé mercredi une condamnation à mort pour le viol d'un enfant, estimant à une petite voix de majorité que la peine capitale ne devait s'appliquer qu'aux meurtriers.

Par cinq voix contre quatre, la plus haute juridiction du pays a considéré que la Constitution, qui interdit les "châtiments cruels et inhabituels", ne permettait pas d'infliger la peine de mort "pour le viol d'une enfant lorsque le crime n'a pas entraîné la mort et n'avait pas pour but d'entraîner la mort".

La Cour a précisé que même si ces viols pouvaient être particulièrement atroces, il n'était pas possible d'établir une liste de circonstances aggravantes justifiant la peine capitale sans laisser trop de place à l'arbitraire, un choix critiqué par les deux candidats à la Maison blanche.

"La peine de mort doit être appliquée dans des circonstances très limitées (... mais) je pense que le viol d'un petit enfant de 6 ou 8 ans est un crime odieux", a déclaré le démocrate Barack Obama, estimant que la Cour aurait dû limiter le recours à la peine capitale en cas de viol au lieu d'asséner "une prohibition générale".

Son rival républicain John McCain, a été encore plus ferme, considérant qu'il était "profondément perturbant (...) qu'il y ait un juge en Amérique qui ne croit pas que le viol d'un enfant représente le plus odieux des crimes et mérite la plus grave des peines".

Depuis quelques années aux Etats-Unis, la législation s'est particulièrement durcie contre les violeurs d'enfants, souvent passibles de peines plancher de 25 ans de réclusion criminelle.

L'Etat de Louisiane (sud) a été le premier à aller jusqu'à permettre la peine de mort, une mesure adoptée en 1995, et le premier à l'appliquer : Patrick Kennedy, 43 ans, a été condamné à mort en 2003 pour le viol de la fille de sa compagne en 1998, quand l'enfant avait huit ans.

En 1977, la Cour suprême américaine avait pourtant invalidé la condamnation à mort d'un violeur d'une adulte, et personne n'a été exécuté aux Etats-Unis depuis 1964 pour un autre crime qu'un meurtre.

Mais en mai 2007, la cour suprême de Louisiane a validé la condamnation de M. Kennedy, faisant valoir que la décision de 1977 ne s'appliquait pas dans le cas du viol d'un enfant.

Même si quatre Etats ont adopté des lois similaires et que d'autres en débattaient, seul un second violeur a été condamné à mort il y a quelques mois, également en Louisiane, pour avoir agressé à plusieurs reprises la fillette de ses voisins pendant l'hiver 2004.

Les deux hommes vont désormais recevoir automatiquement une peine de réclusion à perpétuité sans libération conditionnelle.

"Nous pouvons seulement espérer que l'argent que la Louisiane a consacré à rédiger et défendre cette loi aberrante et anticonstitutionnelle sera désormais consacré à des soins pour les victimes d'abus sexuels et à des mesures qui réduiraient réellement le risque de tels abus", a déclaré Ben Cohen, l'un des avocats de M. Kennedy.

L'idée d'appliquer la peine de mort aux violeurs qui n'ont pas tué leur victime semble en effet aller à contre-courant de l'évolution de l'opinion, la peine de mort perdant du terrain sous l'effet conjugué de retentissantes erreurs judiciaires et de l'instauration de la perpétuité réelle.

De plus, des organisations de défense des victimes redoutaient que les agresseurs n'aient plus aucun intérêt à laisser leur victime en vie.

"Dans la plupart des cas, la justice n'est pas mieux rendue en mettant fin à la vie du coupable mais en l'enfermant et en préservant la possibilité que lui et le système lui permettent de comprendre l'énormité de son crime", a conclu la Cour dans sa décision rédigée par le juge Anthony Kennedy.
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