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Question de la peine de mort

E/CN.4/RES/2003/67
résolution du 24 avril 2003 - Commission des droits de l'homme de l'ONU
Résolution de la Commission des droits de l'homme 2003/67


La Commission des droits de l'homme,

Rappelant l'article 3 de la Déclaration universelle des droits de l'homme qui affirme le droit à la vie de tout individu, l'article 6 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, ainsi que l'article 6 et l'alinéa a de l'article 37 de la Convention relative aux droits de l'enfant,

Rappelant également les résolutions de l'Assemblée générale 2857 (XXVI) et 32/61, en date des 20 décembre 1971 et 8 décembre 1977, ainsi que la résolution 44/128 du 15 décembre 1989, dans laquelle l'Assemblée a adopté et ouvert à la signature, à la ratification et à l'adhésion le deuxième Protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits civils et politiques, visant à abolir la peine de mort,

Rappelant en outre les résolutions pertinentes du Conseil économique et social 1984/50 du 25 mai 1984, 1985/33 du 29 mai 1985, 1989/64 du 24 mai 1989, 1990/29 du 24 mai 1990, 1990/51 du 24 juillet 1990 et 1996/15 du 23 juillet 1996,

Rappelant ses résolutions précédentes, dans lesquelles elle s'est déclarée convaincue que l'abolition de la peine de mort contribue au renforcement de la dignité humaine et à l'élargissement progressif des droits de l'homme,

Notant que, dans certains pays, la peine capitale est souvent prononcée à l'issue de procès qui ne se sont pas déroulés dans le respect des normes internationales d'équité, et que des personnes appartenant à des minorités nationales ou ethniques, religieuses et linguistiques semblent être de façon disproportionnée l'objet de sentences de mort, et condamnant les cas dans lesquels la peine capitale est appliquée à des femmes en vertu d'une législation sexiste,

Se félicitant que la peine de mort soit exclue des peines que le Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie, le Tribunal international pour le Rwanda et la Cour pénale internationale sont habilités à prononcer,

Louant les États qui sont récemment devenus parties au deuxième Protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits civils et politiques, et se félicitant que certains États aient dernièrement signé le deuxième protocole facultatif,

Se félicitant que la peine de mort ait été abolie dans certains États depuis sa dernière session, en particulier dans les États qui ont aboli la peine de mort pour tous les crimes,

Se félicitant également du fait que de nombreux pays qui conservent la peine de mort dans leur législation pénale appliquent un moratoire sur les exécutions,

Se félicitant en outre des initiatives régionales visant à instaurer un moratoire sur les exécutions et à abolir la peine de mort,

Se référant aux garanties pour la protection des droits des personnes passibles de la peine de mort, énoncées dans l'annexe à la résolution 1984/50 du Conseil économique et social,

Profondément préoccupée de constater que plusieurs pays appliquent la peine de mort sans tenir compte des limites établies dans le Pacte et dans la Convention relative aux droits de l'enfant,

Préoccupée de constater que, quand ils appliquent la peine de mort, plusieurs pays ne tiennent pas compte des garanties pour la protection des droits des personnes passibles de la peine de mort,

1. Rappelle le sixième rapport quinquennal du Secrétaire général sur la peine de mort et l'application des garanties pour la protection des droits des personnes passibles de la peine de mort, présenté conformément à la résolution 1995/57 du Conseil économique et social, en date du 28 juillet 1995 (E/2000/3), et accueille avec satisfaction le supplément annuel du Secrétaire général rendant compte des changements survenus dans la législation et la pratique en matière de peine de mort dans le monde entier, qui figure dans son rapport (E/CN.4/2003/106), comme elle l'a demandé dans sa résolution 2002/77;

2. Réaffirme la résolution 2000/17 de la Sous-Commission de la promotion et de la protection des droits de l'homme, en date du 17 août 2000, relative au droit international et à l'imposition de la peine de mort à des personnes âgées de moins de dix-huit ans au moment de la commission du délit;

3. Engage tous les États parties au Pacte international relatif aux droits civils et politiques qui ne l'ont pas encore fait à envisager d'adhérer au deuxième Protocole facultatif se rapportant au Pacte, visant à abolir la peine de mort, ou de le ratifier;

4. Prie instamment tous les États qui maintiennent la peine de mort:

a) De ne pas la prononcer dans le cas de personnes âgées de moins de dix-huit ans et dans le cas de femmes enceintes;

b) De ne prononcer la peine de mort que pour les crimes les plus graves et en vertu d'un jugement final rendu par un tribunal compétent, indépendant et impartial, et de garantir le droit à un procès équitable et le droit de solliciter la grâce ou la commutation de la peine;

c) De veiller à ce que toutes les procédures légales, notamment celles engagées devant des tribunaux ou des juridictions d'exception et en particulier les procédures relatives aux crimes emportant la peine capitale, soient conformes aux garanties de procédure minimales énoncées à l'article 14 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques;

d) De veiller à ce que la notion de «crimes les plus graves» ne s'entende que des crimes intentionnels ayant des conséquences fatales ou extrêmement graves et à ce que la peine de mort ne soit pas imposée pour des actes non violents comme les délits financiers, la pratique religieuse ou l'expression de convictions sans violence et les relations sexuelles entre adultes consentants;

e) De ne pas émettre à l'égard de l'article 6 du Pacte de nouvelles réserves qui puissent être contraires à l'objet et au but du Pacte et de retirer toute réserve de ce type qui pourrait avoir été formulée, étant donné que ledit article 6 consacre les règles minimales pour la protection du droit à la vie et les normes généralement acceptées dans ce domaine;

f) D'observer les garanties pour la protection des droits des personnes passibles de la peine de mort et de satisfaire intégralement à leurs obligations internationales, en particulier celles qu'ils ont contractées en vertu de l'article 36 de la Convention de Vienne sur les relations consulaires, de 1963, et plus particulièrement le droit de recevoir des informations sur l'assistance consulaire dans le contexte d'une procédure juridique;

g) De ne pas prononcer la peine de mort dans le cas de personnes atteintes d'une quelconque forme de maladie mentale, ni d'exécuter un condamné atteint de maladie mentale;

h) D'exempter de la peine capitale les mères ayant des enfants en bas âge;

i) De veiller à ce que, lorsque la peine capitale est appliquée, elle soit exécutée de manière à causer le minimum de souffrances possibles et ne soit pas exécutée en public ni de toute autre manière dégradante et à ce qu'il soit mis immédiatement fin aux modes d'exécution particulièrement cruels ou inhumains, comme par exemple la lapidation;

j) De ne pas exécuter une personne tant qu'une procédure juridique la concernant est en cours, au niveau international ou national;

5. Engage tous les États qui n'ont pas encore aboli la peine de mort à:

a) Limiter progressivement le nombre d'infractions qui emportent cette peine et, pour le moins, à ne pas en étendre l'application aux crimes auxquels elle ne s'applique pas aujourd'hui;

b) Abolir définitivement la peine de mort et, en attendant, instituer un moratoire sur les exécutions;

c) Rendre publics les renseignements concernant l'application de la peine de mort;

d) Donner au Secrétaire général et aux organismes de l'Organisation des Nations Unies compétents des renseignements concernant l'application de la peine capitale et le respect des garanties pour la protection des droits des personnes passibles de la peine de mort, telles qu'elles figurent dans la résolution 1984/50 du Conseil économique et social;

6. Engage les États qui n'appliquent plus la peine de mort, mais la maintiennent en vigueur dans leurs textes législatifs, à l'abolir;

7. Prie les États qui ont reçu une demande d'extradition concernant une personne qui encourt la peine de mort de se réserver explicitement le droit de refuser l'extradition, s'ils ne reçoivent pas des autorités compétentes de l'État demandeur des assurances concrètes que la peine capitale ne sera pas appliquée;

8. Prie le Secrétaire général de continuer à lui présenter, à sa soixantième session, en consultation avec les gouvernements, les institutions spécialisées et les organisations intergouvernementales et non gouvernementales, un supplément annuel à son rapport quinquennal sur la peine de mort et l'application des garanties pour la protection des droits des personnes passibles de la peine de mort, rendant compte des changements survenus dans la législation et la pratique en matière de peine de mort dans le monde entier, en accordant une attention particulière à l'application de la peine de mort à des personnes n'ayant pas atteint l'âge de dix-huit ans au moment du délit;

9. Décide de poursuivre l'examen de la question à sa soixantième session, au titre du même point de l'ordre du jour.



61e séance
24 avril 2003
[Adoptée par 23 voix contre 18, avec
10 abstentions, à l'issue d'un vote enregistré.
Voir chap. XVII. - E/CN.4/2003/L.11/Add.6]
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