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Résolution du Parlement européen du 17 décembre 2009 sur le projet de législation anti-homosexualité en Ouganda

P7_TA-PROV(2009)0119
résolution du 17 décembre 2009 - Union européenne
Pays :
peine de mort / Ouganda
Le Parlement européen ,

— vu les obligations et instruments internationaux en matière de droits de l'homme, notamment ceux prévus par les conventions des Nations unies sur les droits de l'homme et par la Convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales, qui garantissent les droits humains et les libertés fondamentales et prohibent les discriminations,

— vu l'Accord de partenariat entre les membres du groupes des États d'Afrique, des Caraïbes et du Pacifique, d'une part, et la Communauté européenne et ses États membres, d'autre part, signé à Cotonou le 3 juin 2000(1) (l'accord de Cotonou) et les dispositions de cet accord relatives aux droits de l'homme, notamment l'article 9,

— vu les instruments internationaux garantissant les droits humains et les libertés fondamentales et prohibant les discriminations,

— vu les articles 6 et 7 du traité sur l'Union européenne (TUE) et l'article 19 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne (TFUE), qui engagent l'Union européenne, mais aussi ses États membres, à respecter les droits de l'homme et les libertés fondamentales et qui instituent au niveau européen les moyens de lutter contre les discriminations et les violations des droits de l'homme au niveau de l'Union,

— vu la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, notamment son article 21, qui interdit la discrimination en raison de l'orientation sexuelle,

— vu l'ensemble des activités de l'Union européenne visant à lutter contre l'homophobie et la discrimination en raison de l'orientation sexuelle,

— vu ses résolutions antérieures sur l'homophobie, la protection des minorités et les politiques antidiscriminatoires, en particulier celles du 18 janvier 2006 sur l'homophobie en Europe(2) , du 15 juin 2006 sur la montée des violences racistes et homophobes en Europe(3) et du 26 avril 2007 sur l'homophobie en Europe(4) ,

— vu la réunion, le 28 novembre 2009 à Luanda, de la commission des affaires politiques de l'Assemblée parlementaire paritaire (APP) ACP-UE,

— vu la résolution de l'APP ACP-UE du 3 décembre 2009 sur l'intégration sociale et culturelle et la participation des jeunes,

— vu l'article 122, paragraphe 5, de son règlement,

A. considérant qu'un projet de loi "Anti-homosexualité 2009" a été déposé le 25 septembre 2009 par M. David Bahati, député, devant le parlement ougandais,

B. considérant que ce projet de loi propose un renforcement des peines afin de criminaliser l'homosexualité et punir de la détention à perpétuité ou de la peine capitale les personnes suspectées d'être lesbiennes, homosexuelles, bisexuelles ou transsexuelles,

C. considérant que ce projet de loi contient une disposition selon laquelle toute personne, même hétérosexuelle, qui ne signalerait dans les 24 heures l'identité de personnes dont elle sait qu'elles sont lesbiennes, homosexuelles, bisexuelles ou transsexuelles, ou qui défendrait les droits de ces personnes, sera passible d'emprisonnement pouvant aller jusqu'à trois ans,

D. considérant que ce projet prévoit l'annulation, par l'Ouganda, de tout engagement international ou régional que ce pays jugerait incompatible avec les dispositions dudit projet de loi,

E. considérant que le projet a déjà été condamné par M. De Gucht, commissaire européen, par les gouvernements britannique, français et suédois, ainsi que par le président Obama et par le président et le vice-président de la commission des affaires étrangères de la Chambre des Représentants américaine,

F. considérant que le projet de loi a été dénoncé par les organisations non gouvernementales du monde entier, et en Ouganda même, comme une sérieuse entrave à la lutte contre le VIH/sida au sein de la communauté homosexuelle,

G. considérant qu'en Afrique, l'homosexualité n'est légale que dans 13 pays, qu'elle est considérée comme un délit dans 38 pays et qu'elle est passible de la peine de mort en Mauritanie, au Soudan et dans le nord du Nigéria, et que l'adoption d'un tel projet de loi en Ouganda pourrait avoir un effet domino sur d'autres pays d'Afrique où des personnes sont ou pourraient être persécutées en raison de leur orientation sexuelle,

1. souligne que l'orientation sexuelle est une question qui relève du droit de l'individu à la vie privée, droit garanti par le droit international relatif aux droits de l'homme selon lequel le principe d'égalité et de non-discrimination doit être défendu et la liberté d'expression garantie; condamne, dans ce contexte, le projet de loi "Anti-homosexualité 2009";

2. invite en conséquence les autorités ougandaises à rejeter ce projet de loi et à réviser la législation nationale afin de décriminaliser l'homosexualité;

3. rappelle au gouvernement ougandais ses obligations au regard du droit international et de l'accord de Cotonou qui engage au respect des droits humains universels;

4. rappelle les déclarations de la Commission africaine des droits de l'homme et des peuples et de la commission des droits de l'homme des Nations unies selon lesquelles un État ne peut, par sa législation nationale, renier ses obligations internationales en termes de droits de l'homme;

5. se déclare extrêmement préoccupé par l'éventualité que les donateurs internationaux et les organisations non gouvernementales et humanitaires reconsidèrent ou cessent leurs activités dans certains domaines, au cas où ce projet de loi serait adopté;

6. rejette avec force toute initiative visant à instituer la peine de mort;

7. invite le Conseil et la Commission à faire des représentations de toute urgence aux autorités ougandaises et, au cas où le projet de loi serait adopté et où le droit international relatif aux droits de l'homme serait enfreint, à reconsidérer leurs engagements vis à vis de l'Ouganda, notamment en proposant un pays différent pour l'organisation de la Conférence de révision du Statut de Rome, fixée au 31 mai 2010;

8. demande au Conseil, à la Commission et aux États membres d'analyser la situation dans les pays tiers en ce qui concerne les exécutions capitales, la criminalisation ou les discriminations en raison de l'orientation sexuelle, et de prendre des mesures concertées au plan international pour promouvoir le respect des droits de l'homme dans ces pays par des moyens appropriés, par exemple en travaillant en partenariat avec des ONG locales;

9. charge son Président de transmettre la présente résolution au Conseil, à la Commission, aux gouvernements et aux parlements des États membres, ainsi qu'au président de la République d'Ouganda et qu'au président du parlement ougandais.

(1) JO L 317 du 15.12.2000, p. 3.
(2) JO C 287 E du 24.11.2006, p. 179.
(3) JO C 300 E du 9.12.2006, p. 491.
(4) JO C 74 E du 20.3.2008, p. 776.
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