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Constatations du Comité des droits de l'homme - Affaire Kindler [Canada]

CCPR/C/48/D/470/1991.
constatations du 18 novembre 1993 - Comité des droits de l'homme
Pays :
Constatations du Comité des droits de l'homme au titre du paragraphe 4 de l'article 5 du Protocole Facultatif se rapportant au Pacte International relatif aux Droits Civils et Politiques
Quarante-huitième session
18 novembre 1993
Communication No 470/1991*
CCPR/C/48/D/470/1991. (Jurisprudence)

Présentée par : Joseph Kindler [représenté par un conseil]
Au nom de : L'auteur
Etat partie : Canada
Date de la communication : 25 septembre 1991 (communication initiale)

Le Comité des droits de l'homme, institué en vertu de l'article 28 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques,

Réuni le 30 juillet 1993,

Ayant achevé l'examen de la communication No 470/1991, présentée au Comité par M. Joseph Kindler en vertu du Protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits civils et politiques,

Ayant tenu compte de toutes les informations écrites qui lui ont été fournies par l'auteur de la communication et par l'Etat partie intéressé,

Adopte ses constatations au titre du paragraphe 4 de l'article 5 du Protocole facultatif. Le texte de six opinions individuelles (dissidentes et concordantes), signées par sept membres du Comité, est joint aux présentes constatations..

Les faits présentés




1. L'auteur de la communication est un citoyen des Etats-Unis d'Amérique, Joseph Kindler, né en 1961, qui était détenu dans un pénitencier de Montréal (Canada) à la date de la communication, et qui a été extradé aux Etats-Unis le 26 septembre 1991. Il prétend être victime d'une violation des articles 6, 7, 9, 10, 14 et 26 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques. Il est représenté par un conseil.

2.1 En novembre 1983, l'auteur a été déclaré coupable d'assassinat et d'enlèvement dans l'Etat de Pennsylvanie et le jury s'est prononcé pour la peine de mort. Selon l'auteur, cette recommandation a force obligatoire pour le tribunal. L'auteur s'est évadé en septembre 1984, avant que la sentence n'ait été formellement rendue. Il a été arrêté dans la province de Québec en avril 1985. En juillet 1985, les Etats-Unis ont demandé son extradition, et, en août 1985, la Cour supérieure du Québec a accédé à leur requête.

2.2 L'article 6 du Traité d'extradition entre le Canada et les Etats-Unis dispose que :

"Lorsque l'infraction motivant la demande d'extradition est punissable de la peine de mort en vertu des lois de l'Etat requérant et que les lois de l'Etat requis n'autorisent pas cette peine pour une telle infraction, l'extradition peut être refusée à moins que l'Etat requérant ne garantisse à l'Etat requis, d'une manière jugée suffisante par ce dernier, que la peine de mort ne sera pas infligée ou, si elle l'est, ne sera pas appliquée."

Le Canada a aboli la peine de mort en 1976, sauf pour certaines infractions militaires.

2.3 Le pouvoir de demander des garanties à l'effet que la peine de mort ne sera pas infligée est conféré au Ministre de la justice conformément à l'article 25 de la loi sur l'extradition. Le 17 janvier 1986, après avoir entendu le conseil de l'auteur, le Ministre de la justice a décidé de ne pas demander de telles garanties.

2.4 L'auteur a déposé une demande de révision de la décision ministérielle auprès de la Cour fédérale, qui l'a rejetée en janvier 1987. Le recours formé par l'auteur devant la cour d'appel a été rejeté en décembre 1988. L'affaire est ensuite venue devant la Cour suprême du Canada, qui a décidé le 26 septembre 1991 que l'extradition de M. Kindler ne violerait pas les droits que lui garantit la Charte canadienne des droits de la personne. L'auteur a été extradé le même jour.


La plainte




3. L'auteur soutient que la décision de l'extrader viole les articles 6, 7, 9, 14 et 26 du Pacte. Il fait valoir que la peine de mort constitue en soi un traitement ou un châtiment cruel et inhumain et que les conditions de détention dans le "couloir de la mort" sont cruelles, inhumaines et dégradantes. Il fait également valoir que la procédure pénale en Pennsylvanie, dans ses parties ayant un rapport direct avec la peine capitale, ne satisfait pas aux principes fondamentaux de la justice. A cet égard, l'auteur, qui est Blanc, dénonce en termes généraux le préjugé racial qui prévaut aux Etats-Unis lorsqu'il s'agit d'infliger la peine capitale, mais sans étayer cette allégation par des faits se rapportant à son cas particulier.


Observations de l'Etat partie et réponse de l'auteur




4.1 L'Etat partie rappelle que l'auteur est entré illégalement sur le territoire canadien en avril 1985. Il affirme que la communication est irrecevable ratione personae, loci et materiae.

4.2 Il fait valoir que l'auteur ne saurait être considéré comme une victime au sens du Protocole facultatif, puisque ses allégations se fondent sur des conjectures concernant l'éventualité d'événements futurs, qui ne se réaliseront pas nécessairement et qui dépendent de la législation des Etats-Unis et de décisions des autorités de ce pays. L'Etat partie renvoie à cet égard à la constatation du Comité relative à la communication No 61/1979a, où il est constaté que le Comité "n'est tenu aux termes de son mandat qu'à examiner si une personne donnée a été victime d'une violation effective de ses droits. Il n'est pas habilité à analyser dans l'absolu si la législation nationale contrevient au Pacte".

4.3 L'Etat partie souligne que les allégations de l'auteur visent le droit pénal et le système judiciaire d'un pays qui n'est pas le Canada. Il renvoie à la décision d'irrecevabilité rendue par le Comité à propos de la communication No 217/1986b, dans laquelle le Comité rappelle "qu'il ne peut recevoir et examiner des communications qu'en ce qui concerne des demandes relevant de la juridiction d'un Etat partie au Pacte". L'Etat partie affirme que le Pacte n'impose aucune responsabilité à un Etat concernant des événements hypothétiques qui ne relèvent pas de sa juridiction.

4.4 En outre, l'Etat partie soutient que la communication devrait être déclarée irrecevable car incompatible avec les dispositions du Pacte, puisque le droit de ne pas être extradé n'y est nullement prévu. A cet égard, l'Etat partie invoque la décision d'irrecevabilité rendue par le Comité à propos de la communication No 117/1981c : "Aucune disposition du Pacte n'interdit à un Etat partie de solliciter l'extradition d'une personne d'un autre pays." Il soutient en outre que même si l'on pouvait établir que, dans des circonstances exceptionnelles, l'extradition entrait dans la sphère des garanties prévues par le Pacte, de telles circonstances sont absentes en l'espèce.

4.5 L'Etat partie renvoie en outre au Traité type d'extradition de l'Organisation des Nations Uniesd, qui laisse clairement la possibilité d'extrader sans condition puisque l'obtention d'assurances concernant la peine capitale y est laissée à la discrétion de l'Etat requis, comme stipulé à l'article 6 du Traité d'extradition entre les Etats-Unis d'Amérique et le Canada. Il conclut qu'empêcher la remise d'un fugitif dont l'extradition est légitimement demandée par une partie au Traité irait à l'encontre des principes et objectifs des traités d'extradition et aurait des conséquences regrettables pour les Etats qui refusent d'accéder à ces demandes. Par exemple, l'Etat partie fait observer qu'il a avec les Etats-Unis une frontière immense, facile à franchir, qui ferait de son territoire un refuge idéal pour les criminels fuyant la justice des Etats-Unis. Si ces fugitifs ne pouvaient être extradés en raison du risque théorique qu'ils courent d'être condamnés à mort, ils seraient effectivement intouchables et devraient être autorisés à rester impunément dans le pays, constituant ainsi une menace pour la sûreté et la sécurité des habitants.

4.6 L'Etat partie fait enfin observer que l'auteur n'a pas fourni de preuves à l'appui de ses allégations selon lesquelles le sort qui pourrait lui être réservé aux Etats-Unis constituerait une violation des droits garantis par le Pacte. L'Etat partie souligne à cet égard qu'infliger la peine de mort n'est pas illégal en soi selon le Pacte. Pour ce qui est du délai entre la peine de mort et son exécution, il voit mal comment une période de détention pendant laquelle un condamné utiliserait tous les recours disponibles peut être considérée comme une violation du Pacte.

5. Dans sa réponse à la communication de l'Etat partie, l'auteur maintient que, dans la mesure où le droit à la vie est en jeu, aucun argument ne peut récuser la compétence du Comité en matière d'extradition.


Délibérations du Comité au sujet de la recevabilité et décision




6.1 A sa quarante-cinquième session, en juillet 1992, le Comité a examiné la question de la recevabilité de la communication. Il a fait observer que l'extradition en tant que telle était en dehors du domaine d'application du Pactee mais que l'Etat partie pouvait avoir des obligations en rapport avec une question en elle-même extérieure au Pacte, par référence à d'autres dispositions de cet instrumentf. Le Comité a noté que l'auteur ne prétendait pas que l'extradition en soi violait le Pacte, mais que les circonstances particulières liées aux effets de son extradition soulèveraient des questions en rapport avec des dispositions spécifiques du Pacte. Le Comité a donc estimé que la communication de ce fait n'était pas exclue ratione materiae.

6.2 Le Comité a examiné l'affirmation de l'Etat partie selon laquelle la communication serait irrecevable ratione loci. L'article 2 du Pacte demande aux Etats parties de garantir les droits des personnes relevant de leur juridiction. Si une personne est légalement expulsée ou extradée, l'Etat partie concerné ne sera généralement pas responsable, au regard du Pacte, des violations des droits de cette personne qui peuvent se produire plus tard dans l'autre juridiction. En ce sens, l'Etat partie n'est manifestement pas tenu de garantir les droits des personnes dans une autre juridiction. Cependant, si un Etat partie prend une décision concernant une personne sous sa juridiction, dont la conséquence nécessaire et prévisible est que les droits de cette personne en vertu du Pacte seront violés sous une autre juridiction, l'Etat partie lui-même peut violer le Pacte. Cela découle du fait que le devoir qui incombe à un Etat partie conformément à l'article 2 du Pacte ne serait pas rempli si une personne était remise à un autre Etat (partie ou non au Pacte) où un traitement contraire au Pacte est certain ou constitue le but même de la remise de cette personne. Par exemple, un Etat partie violerait le Pacte s'il remettait une personne à un autre Etat dans des circonstances où il est prévisible qu'elle serait torturée. Le caractère prévisible de la conséquence signifie que l'Etat partie commet une violation dans le présent, même si la conséquence ne se produit que plus tard.

6.3 Le Comité s'est donc jugé compétent pour examiner si l'Etat partie avait violé le Pacte en décidant d'extrader l'auteur en vertu du Traité d'extradition de 1976 entre les Etats-Unis et le Canada, et de la loi sur l'extradition de 1985.

6.4 Le Comité a fait observer que le Pacte n'interdisait pas la peine capitale pour les crimes les plus graves à certaines conditions. En ce qui concerne ce que l'on appelle "le syndrome du quartier des condamnés à mort", le Comité a rappelé sa jurisprudence et a noté qu'"une procédure judiciaire prolongée ne constitue pas en soi un traitement cruel, inhumain ou dégradant, même si elle peut être pour les prisonniers condamnés une cause de tension nerveuse"g. Cela est vrai également des procédures d'appel et de révision dans les affaires où la peine capitale est prononcée, bien qu'une évaluation des circonstances particulières à chaque cas soit nécessaire. Dans les Etats dont le système judiciaire prévoit la révision des condamnations et des sentences pénales, un élément de retard entre l'imposition légale d'une sentence de mort et l'épuisement des recours utiles peut être nécessaire pour réexaminer la sentence. Ainsi, même des détentions prolongées dans des conditions sévères, dans un quartier de condamnés à mort, ne peuvent être considérées comme constituant un traitement cruel, inhumain ou dégradant, si le condamné se prévaut simplement des recours en appelh. Cependant, dans chaque affaire, il faut tenir compte des faits spécifiques.

6.5 Le Comité a observé en outre que l'article 6 autorisait les Etats, d'une manière limitée, à prononcer la peine capitale dans leur propre juridiction. Il a décidé d'examiner quant au fond l'extension de la portée de cette autorisation en vertu de l'article 6 à l'application prévisible de la peine capitale dans un autre Etat, même s'il existe des garanties de procédure complètes.

6.6 Le Comité a aussi conclu qu'il ressortait des travaux préparatoires que l'article 13 du Pacte, qui prévoit des droits spécifiques en ce qui concerne l'expulsion des étrangers se trouvant légalement dans le territoire d'un Etat partie, ne vise pas à s'écarter des arrangements normaux d'extradition. Néanmoins, si un étranger quitte le territoire d'un pays en étant expulsé ou extradé, en principe les garanties de l'article 13 s'appliquent, au même titre que les exigences du Pacte dans son ensemble. A cet égard, le Comité a noté que l'auteur, bien qu'entré illégalement en territoire canadien, avait eu largement la possibilité de faire valoir ses arguments contre l'extradition devant les tribunaux canadiens, y compris la Cour suprême du Canada, qui avait examiné les faits et les preuves qui lui avaient été présentés, et conclu que l'extradition de l'auteur ne violerait pas ses droits en vertu du droit canadien ou du droit international. Dans ce contexte, le Comité a réaffirmé sa jurisprudence constante selon laquelle il n'a pas compétence pour réévaluer les faits et les preuves examinés par les tribunaux nationaux. Ce qu'il peut faire, c'est vérifier si l'auteur a bénéficié de toutes les garanties de procédure prévues dans le Pacte. Le Comité a conclu qu'une étude soigneuse de tous les éléments présentés par l'auteur et par l'Etat partie ne révélait pas d'arguments en faveur d'une plainte fondée sur l'absence de ces garanties pendant la procédure d'extradition.

6.7 Le Comité a fait aussi observer qu'en principe la peine capitale imposée légalement, selon l'article 6, ne soulevait pas en soi de question en rapport avec l'article 7. Il a examiné s'il existait néanmoins des circonstances spéciales qui, dans cette affaire particulière, soulèveraient une question en rapport avec l'article 7. Le droit canadien ne prévoit pas la peine de mort, sauf dans les affaires militaires. Le Canada peut, en vertu de l'article 6 du Traité d'extradition, demander des garanties à l'autre Etat qui maintient la peine de mort, pour que cette peine ne soit pas infligée. Il peut aussi, conformément à l'article 6, refuser d'extrader une personne lorsque de telles garanties ne sont pas reçues. Si en vertu du Traité d'extradition et du droit canadien demander de telles garanties et décider d'extrader ou non en leur absence est laissé à sa discrétion, ces décisions peuvent soulever des questions en rapport avec le Pacte. En l'espèce, il peut être pertinent de savoir si l'Etat partie s'est assuré, avant de décider de ne pas invoquer l'article 6 du Traité, si cela n'entraîne pas pour l'auteur une violation nécessaire et prévisible de ses droits en vertu du Pacte.

6.8 Le Comité a aussi conclu que les méthodes employées pour l'application judiciaire de la peine capitale dans une affaire particulière pouvaient aussi, dans un cas particulier, soulever des questions en rapport.

7. Le 31 juillet 1992, le Comité a décidé que la communication était recevable dans la mesure où elle pouvait soulever des questions en rapport avec les articles 6 et 7 du Pacte. Il a indiqué de plus que, conformément au paragraphe 4 de l'article 93 de son règlement intérieur, l'Etat partie pouvait demander la révision de la décision de recevabilité au moment où le Comité prendrait sa décision quant au fond. Deux membres du Comité ont joint une opinion dissidente en appendice à la décision concernant la recevabilitéi.


Observations de l'Etat partie quant au fond et demande de réexamen de la recevabilité




8.1 Dans ses observations datées du 2 avril et du 26 mai 1993, l'Etat partie expose des faits concernant la procédure d'extradition en général, les rapports du Canada et des Etats-Unis en matière d'extradition et les circonstances particulières de l'affaire. Il demande en outre que le Comité revoie sa décision de recevabilité.

8.2 L'Etat partie rappelle que "l'extradition existe afin de contribuer à la sécurité des citoyens et des résidents des Etats. Les délinquants criminels dangereux qui cherchent un refuge leur permettant d'échapper à une poursuite ou à une condamnation au criminel sont livrés à l'Etat sur le territoire duquel ils ont commis leurs crimes pour y être traduits en justice. L'extradition encourage la coopération en matière de justice pénale et renforce la mise en application du droit interne. Elle se veut une procédure simple et expéditive. L'extradition cherche à établir un équilibre entre les droits de l'individu en cause et la nécessité de protéger les résidents des deux Etats parties à tout traité d'extradition. Les rapports entre le Canada et les Etats-Unis en matière d'extradition remontent à 1974. ... En 1842, les Etats-Unis et la Grande-Bretagne conclurent le traité Ashburton-Webster dont certains des articles régissaient la livraison mutuelle des criminels. ... Ce traité demeura en vigueur jusqu'à la conclusion du Traité d'extradition entre le Canada et les Etats-Unis de 1976, qui est actuellement en vigueur."

8.3 S'agissant du principe aut dedere aut judicare, l'Etat partie explique que, si certains Etats se reconnaissent le droit de juger des individus même si le crime a été commis à l'étranger, lorsque ce sont leurs propres nationaux qui sont soit les victimes soit les auteurs du crime commis, d'autres Etats, dont le Canada ainsi que certains autres Etats de common law, ne le font pas.

8.4 L'extradition au Canada est régie par la loi sur l'extradition et les conditions fixées par le traité applicable. La Charte canadienne des droits et libertés, qui fait partie de la Constitution du Canada et reconnaît un grand nombre des droits protégés par le Pacte, est applicable. La procédure d'extradition comporte deux étapes selon le droit canadien. La première consiste en une instance judiciaire où le juge saisi recherche s'il existe un fondement en fait et en droit qui justifie l'extradition. L'individu visé par l'extradition peut présenter des preuves au cours de cette instruction judiciaire. Si le juge acquiert la conviction que les preuves apportées fournissent un fondement juridique justifiant l'extradition, il ordonne l'incarcération de l'individu jusqu'à ce qu'il soit livré à l'Etat requérant. Le contrôle judiciaire du mandat de dépôt de l'individu qui attend d'être livré peut être demandé par voie d'habeas corpus, devant une juridiction provinciale. Il est possible d'interjeter appel de la décision du juge en ce qui a trait à l'habeas corpus à la cour d'appel de la province puis, avec son autorisation, à la Cour suprême du Canada. La seconde étape de la procédure d'extradition commence dès que les appels de la phase judiciaire ont été épuisés. La responsabilité de la décision de livrer l'individu réclamé pour extradition revient au Ministre de la justice. L'individu peut présenter au Ministre des conclusions écrites et son conseil, sur autorisation, peut comparaître et plaider devant le Ministre. Lorsqu'il se prononce sur la livraison, le Ministre tient compte de l'ensemble du dossier constitué lors de la phase judiciaire et des plaidoiries verbales et écrites de l'intéressé; la décision du Ministre est discrétionnaire, mais ce pouvoir discrétionnaire est circonscrit par la loi. La décision est fondée sur la prise en compte d'un grand nombre de facteurs, y compris les obligations du Canada en vertu du traité d'extradition applicable, les faits caractéristiques de l'individu et la nature du crime sur lequel la demande d'extradition est fondée. En outre, le Ministre doit tenir compte des modalités de la Charte canadienne des droits et libertés ainsi que des divers instruments, dont le Pacte, où sont inscrites les obligations internationales du Canada en matière de droits de l'homme. Enfin, l'intéressé peut demander le contrôle judiciaire de la décision du Ministre de prendre l'arrêté d'extradition par un tribunal de province et faire appel, avec son autorisation, auprès de la Cour suprême. Quand elle interprète les obligations du Canada en matière de droits de l'homme, en vertu de la Charte canadienne, la Cour suprême est guidée par les instruments internationaux ratifiés par le Canada, y compris le Pacte.

8.5 Dans les cas de condamnation à mort, le Ministre de la justice décide s'il y a lieu de demander des assurances, en fonction des faits particuliers de l'affaire. Le Traité d'extradition entre le Canada et les Etats-Unis ne prévoit pas que des assurances soient demandées automatiquement, mais seulement dans les cas où les faits particuliers justifient un exercice spécial de ce pouvoir discrétionnaire.

8.6 En ce qui concerne l'abolition de la peine de mort au Canada, l'Etat partie note que "Un nombre important d'Etats de la communauté internationale, y compris les Etats-Unis, infligent toujours la peine de mort. Le Gouvernement du Canada n'a pas recours à l'extradition comme moyen d'imposer sa conception particulière du droit pénal à d'autres Etats. En demandant des assurances ipso facto, dans tous les cas, en l'absence de circonstances exceptionnelles, le Canada se trouverait à dicter à l'Etat requérant, dans le cas présent les Etats-Unis, de quelle façon il doit sanctionner ses propres délinquants, ayant enfreint son droit pénal propre. Le Gouvernement du Canada estime qu'il s'agirait là d'une ingérence injustifiée dans les affaires intérieures d'un autre Etat. Le Gouvernement du Canada se réserve le droit, ... de refuser d'extrader en l'absence d'assurances. Ce droit est réservé pour le seul cas où des circonstances exceptionnelles se présenteraient. De l'avis du Gouvernement du Canada, des éléments de preuve démontrant qu'il y a danger certain ou prévisible que l'individu réclamé soit victime de violations du Pacte pourraient être un exemple de circonstances exceptionnelles susceptibles de justifier le recours à cette mesure particulière consistant à exiger des assurances aux termes de l'article 6. Mais Kindler n'a apporté aucun élément de preuve au cours du déroulement de la procédure d'extradition au Canada et la présente communication n'apporte également aucune preuve qui vienne soutenir l'allégation que l'infliction de la peine de mort aux Etats-Unis en général, ou dans l'Etat de Pennsylvanie en particulier, viole le Pacte."

8.7 L'Etat partie se réfère aussi à l'article 4 du Traité d'extradition type des Nations Unies, qui énumère des motifs facultatifs de refus d'une demande d'extradition : "L'extradition peut être refusée : d) Si l'infraction pour laquelle l'extradition est demandée est punie de mort dans l'Etat requérant, sauf si celui-ci donne à l'Etat requis des assurances suffisantes à l'effet que la peine de mort ne sera pas prononcée ou, si elle l'est, ne sera pas appliquée." De même, l'article 6 du Traité d'extradition entre le Canada et les Etats-Unis d'Amérique prévoit que la décision de demander des assurances au sujet de la peine de mort est discrétionnaire.

8.8 En ce qui concerne le rapport entre l'extradition et la protection de la société, l'Etat partie fait valoir que le Canada et les Etats-Unis ont une frontière commune - non gardée - de 4 800 kilomètres, que les fugitifs sont nombreux à passer des Etats-Unis au Canada et qu'au cours des 12 dernières années, le nombre de demandes d'extradition émanant des Etats-Unis a été en progression constante. En 1980, il y avait eu 29 demandes, en 1992, ce nombre atteignait 83. "Les demandes mettant en cause une éventuelle sentence de mort représentent un problème nouveau, qui va grossissant ... une politique en vertu de laquelle des assurances seraient exigées ipso facto aux termes de l'article 6 du Traité d'extradition canado-américain, encouragerait un plus grand nombre encore de délinquants - les auteurs des crimes les plus graves tout particulièrement - à fuir les Etats-Unis et à venir se réfugier au Canada. Le Canada n'a nullement l'intention de devenir une terre d'asile pour les criminels les plus recherchés et les plus dangereux des Etats-Unis. Si le Pacte devait avoir pour effet de porter atteinte au pouvoir discrétionnaire du Canada de ne pas exiger d'assurances, un nombre croissant de criminels pourraient gagner le Canada afin d'échapper à la peine capitale."

9.1 Dans le cas de M. Kindler, l'Etat partie rappelle qu'il a contesté le mandat de dépôt et l'arrêté d'extradition conformément à la procédure d'extradition exposée ci-dessus, et que son conseil a plaidé oralement et par écrit auprès du Ministre, pour qu'il exige des assurances que la peine de mort ne serait pas infligée. Il a fait valoir que le livrer alors qu'il aurait à faire face à une sentence de mort aux Etats-Unis serait porter atteinte à ses droits aux termes de l'article 7 (comparable aux articles 6 et 9 du Pacte) et de l'article 12 (équivalent de l'article 7 du Pacte) de la Charte canadienne des droits et libertés.

9.2 Pour ce qui est de la décision de recevabilité prise par le Comité, l'Etat partie réitère sa position, qui est que la communication est irrecevable ratione materiae parce que l'extradition, en tant que telle, n'est pas régie par le Pacte. Un examen des travaux préparatoires montre que les auteurs du Pacte ont étudié spécifiquement une proposition d'insertion d'une mention de l'extradition dans le Pacte, et l'ont rejetée. L'Etat partie considère, à la lumière de l'histoire de la négociation du Pacte, qu'une "décision d'étendre le Pacte aux traités d'extradition ou aux décisions applicables à des cas individuels prises sur leur fondement serait élargir les principes qui régissent l'interprétation des instruments sur les droits internationaux d'une manière déraisonnable et inacceptable. D'une manière déraisonnable en effet, car les principes d'interprétation qui reconnaissent que les instruments sur les droits de l'homme sont susceptibles de croître et que les droits de l'homme évoluent avec le temps ne peuvent être invoqués à l'encontre de limitations expresses apportées à l'application d'un instrument donné. L'absence de mention de l'extradition dans les articles du Pacte, lorsque considérée en conjonction avec l'intention de ses auteurs, doit être interprétée comme une limitation expresse."

9.3 S'agissant du fond, l'Etat partie souligne que toutes les questions liées à l'extradition de M. Kindler alors qu'il risque la peine de mort ont été dûment examinées. "Dans la mesure où la prémisse de l'application du Pacte à l'extradition est adoptée, ... l'Etat requis sera en violation du Pacte seulement s'il livre l'individu réclamé alors que l'injonction d'un traitement ou d'une peine ou l'application d'une procédure judiciaire, en soi contraire au Pacte, sont certaines ou prévisibles." En l'espèce, l'Etat partie soutient que s'il "était raisonnablement prévisible qu'il soit incarcéré dans l'Etat de Pennsylvanie, sous le coup d'une sentence de mort", il n'était pas "raisonnablement prévisible qu'il soit effectivement exécuté ou détenu dans des conditions qui violent les droits reconnus dans le Pacte". L'Etat partie fait remarquer que M. Kindler dispose de nombreuses voies de recours aux Etats-Unis et qu'il peut présenter une demande de clémence; de plus, il peut saisir les tribunaux des Etats-Unis au sujet de ses conditions de détention pendant que les appels qu'il a formés concernant la peine de mort suivent leur cours.

9.4 En ce qui concerne l'application de la peine de mort aux Etats-Unis, l'Etat partie rappelle que l'article 6 du Pacte n'a pas supprimé la peine de mort en droit international. "Dans les pays qui ne l'ont pas abolie, la sentence de mort peut encore être prononcée pour les crimes les plus graves, en conformité avec la loi en vigueur au moment de la perpétration du crime, sans violation des dispositions du Pacte ni celles de la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide. Une sentence de mort ne peut être exécutée que conformément à un jugement définitif, rendu par un tribunal compétent. Il se peut que le Canada viole le Pacte si celui qu'il extrade risque de se voir infliger la peine de mort et s'il est raisonnablement prévisible que l'Etat requérant infligera la peine de mort dans des circonstances où il violerait l'article 6. Plus précisément, il se peut que l'Etat requérant viole le Pacte s'il livre l'individu réclamé à un Etat qui inflige la peine de mort pour d'autres crimes que les crimes les plus graves, pour des actes qui n'étaient pas incriminés par la loi en vigueur au moment où ils ont été accomplis, ou qui exécuterait une sentence de mort en l'absence de jugement définitif rendu par un tribunal compétent ou contrairement à un tel jugement. Ce n'est pas ce qu'il ressort des faits du présent dossier. ... Kindler n'a saisi les tribunaux canadiens, le Ministre de la justice ou le Comité d'aucune preuve permettant d'indiquer une violation par les Etats-Unis de l'un des critères stricts fixés par l'article 6 lorsqu'ils ont demandé au Canada son extradition. ... Le Gouvernement du Canada, en la personne du Ministre de la justice, s'estimait satisfait au moment où l'arrêté d'extradition a été pris, que, si Kindler devait être exécuté dans l'Etat de Pennsylvanie, ce serait dans le respect des conditions expressément prévues par l'article 6 du Pacte. Le Gouvernement du Canada demeure convaincu qu'il en serait ainsi."

9.5 Enfin, l'Etat partie fait remarquer qu'il "se trouve placé dans une position difficile, ayant à tenter de défendre le système judiciaire pénal des Etats-Unis devant le Comité. Il fait valoir qu'il n'a jamais été voulu que la procédure établie par le Protocole facultatif ait pour effet de placer un Etat dans une position où il aurait à défendre les lois et pratiques d'un autre Etat devant le Comité."

9.6 S'agissant de la question de savoir si la peine de mort constitue une violation de l'article 7 du Pacte, l'Etat partie fait valoir qu'"il ne peut y avoir une lecture ou une interprétation de l'article 7 qui ne fasse pas référence à l'article 6. Le Pacte doit être interprété comme un tout et ses articles comme étant en harmonie. ... Il se peut que certains modes d'exécution soient contraires à l'article 7. La torture à mort semble être comprise, dans cette catégorie, puisque ce châtiment porte atteinte à l'article 7. D'autres modes d'exécution peuvent violer le Pacte, parce qu'ils s'avèrent cruels, inhumains ou dégradants. Mais, la peine de mort étant licite à l'intérieur du cadre étroit des paramètres fixés par l'article 6, il doit inévitablement exister certains modes d'exécution qui ne violent pas l'article 7."

9.7 Pour ce qui est des méthodes d'exécution, l'Etat partie indique que la méthode utilisée en Pennsylvanie est l'injection d'un produit mortel, méthode préconisée par les défenseurs de l'euthanasie pour les patients en phase terminale. Cette méthode est donc celle qui cause le moins de souffrance.

9.8 En ce qui concerne le "syndrome du quartier des condamnés à mort", l'Etat partie fait valoir que chaque affaire doit être examinée en fonction des faits spécifiques, y compris les conditions de détention dans l'établissement où le prisonnier sera incarcéré, l'âge et l'état physique et mental du condamné, la durée raisonnablement prévisible de la période d'incarcération du détenu dans ces conditions, les raisons sous-jacentes de cette durée et les avenues, le cas échéant, qui peuvent être empruntées pour remédier à d'inacceptables conditions. "... Kindler a soutenu devant le Ministre de la justice et les tribunaux canadiens que les conditions prévalant dans 'l'antichambre de la mort' dans l'Etat de Pennsylvanie sont assimilables à une violation de ses droits. Les preuves qu'il présente consistent en certains témoignages et en articles de revues savantes sur l'effet que l'électrocution, en tant que mode d'exécution judiciaire, aurait sur l'état psychologique des détenus incarcérés dans l'antichambre de la mort. Il n'a soumis aucune preuve portant sur les conditions ou le régime pénitentiaires dans l'Etat de Pennsylvanie... Il n'a présenté aucun élément de preuve portant sur d'éventuelles contestations de la sentence de mort aux Etats-Unis qu'il aurait planifiées ni de la durée d'incarcération à prévoir en attendant une réponse définitive des tribunaux américains. Il n'a présenté aucune preuve de son intention de solliciter la commutation de sa peine. Les preuves qu'il apporte ont été appréciées par les tribunaux et par le Ministre de la justice et jugées peu concluantes et, par conséquent, insuffisantes pour renverser les prémisses sous-jacentes aux rapports existant entre le Canada et les Etats-Unis en matière d'extradition. Le Gouvernement du Canada fait valoir que le Ministre de la justice et les tribunaux canadiens, dans le cours de la procédure d'extradition suivie au Canada, avec ses deux phases décisionnelles et ses voies de recours et de contrôle judiciaires, ont examiné et apprécié toutes les allégations et les faits invoqués par Kindler. Le Ministre de la justice, en décidant de livrer Kindler, alors qu'il aurait à faire face éventuellement à une sentence de mort, a tenu compte de tous ces facteurs. Ces preuves n'ont pas entraîné la conviction chez le Ministre que les conditions d'incarcération dans l'Etat de Pennsylvanie, considérées en conjonction avec la justification d'un délai d'exécution et l'accès permanent aux tribunaux aux Etats-Unis, violeraient les droits de Kindler, que ce soit aux termes de la Charte canadienne des droits et libertés ou du Pacte. La Cour suprême du Canada a confirmé la décision du Ministre, montrant clairement que celle-ci n'était pas considérée comme ayant pour effet de violer les droits reconnus à Kindler. ... Le Ministre de la justice et les tribunaux canadiens en sont venus à la conclusion que Kindler ne verrait pas ses droits violés par ce qu'on peut qualifier de 'syndrome de l'antichambre de la mort'. Le Gouvernement du Canada soutient que la procédure d'extradition et ses conséquences dans le cas de Kindler respectent les obligations du Canada, en vertu du Pacte, sur ce point."


Réponse du conseil de l'auteur




10.1 Dans sa réponse aux observations de l'Etat partie, le conseil de l'auteur fait valoir que, si l'article 6 du Pacte prévoit bien la possibilité d'appliquer la peine capitale, le paragraphe 2 de l'article 6 ne vise que les pays "où la peine de mort n'a pas été abolie". Comme le Canada a aboli la peine de mort pour les infractions autres que militaires, le principe selon lequel on ne peut pas faire indirectement ce que l'on ne peut pas faire directement s'applique et le Canada était tenu de demander des assurances que M. Kindler ne serait pas exécuté et serait traité dans le respect de l'article 7 du Pacte.

10.2 Le conseil de l'auteur se réfère à l'exposé des faits présenté à la Cour suprême du Canada au nom de M. Kindler. Cet exposé traitait des aspects pertinents du droit constitutionnel et administratif canadien et les arguments utilisés sont, d'après l'auteur, également applicables, mutatis mutandis, aux articles 6 et 7 du Pacte. Dans les paragraphes 38 à 49 de l'exposé des faits, le conseil de l'auteur soutient que l'usage qui est fait de la peine de mort aux Etats-Unis n'est pas compatible avec les normes du Pacte. Il cite un livre de Zimring et Hawkings [Capital Punishment and the American Agenda (1986)] qui met en relief l'absence de tout effet dissuasif et les motifs essentiellement fondés sur la vengeance qui expliquent la recrudescence de l'application de la peine capitale aux Etats-Unis. Il cite aussi de longs extraits d'un jugement de la Cour européenne des droits de l'homme dans l'affaire Soering c. Royaume-Uni. Il précise que si la majorité des membres de la Cour ont refusé de conclure que la peine capitale constituait en soi et dans chaque cas un traitement cruel et inhabituel, dans tous les cas, elle n'en a pas moins condamné le phénomène du quartier des condamnés à mort en tant que tel. La Cour européenne a conclu :

"Aucun détenu condamné à mort ne saurait éviter l'écoulement d'un certain délai entre le prononcé et l'exécution de la peine, ni les fortes tensions inhérentes au régime rigoureux d'incarcération nécessaire. Le caractère démocratique de l'ordre juridique virginien en général, et notamment les éléments positifs des procédures de jugement, de condamnation et de recours en Virginie ne suscitent aucun doute. La Cour reconnaît, avec la Commission, que le système judiciaire auquel le requérant se verrait assujetti aux Etats-Unis n'est en soi ni arbitraire ni déraisonnable; au contraire, il respecte la prééminence du droit et accorde à l'accusé passible de la peine de mort des garanties procédurales non négligeables. Les détenus du 'couloir de la mort' bénéficient d'une assistance, par exemple sous la forme de services psychologiques et psychiatriques. (...) Eu égard, cependant, à la très longue période à passer dans le 'couloir de la mort' dans des conditions aussi extrêmes, avec l'angoisse omniprésente et croissante de l'exécution de la peine capitale, et à la situation personnelle du requérant, en particulier son âge et son état mental à l'époque de l'infraction, une extradition vers les Etats-Unis exposerait l'intéressé à un risque réel de traitement dépassant le seuil fixé par l'article 3. L'existence, en l'espèce, d'un autre moyen d'atteindre le but légitime de l'extradition, sans entraîner pour autant des souffrances d'une intensité ou durée aussi exceptionnelles, représente une considération pertinente supplémentaire."

10.3 Le conseil cite en outre des extraits de l'opinion du juge DeMeyer qui fait valoir qu'aucun Etat partie à la Convention ne peut dans ce contexte, même s'il n'a pas encore ratifié le sixième Protocole, être autorisé à extrader un individu si celui-ci court le risque d'être mis à mort dans l'Etat requérant.

10.4 Le conseil cite aussi des extraits de nombreux articles analysant la décision prise dans l'affaire Soering, notamment un article de Gino J. Naldi, de l'Université d'East Anglia :

"La Cour européenne de justice a examiné la question de savoir si la peine de mort constituait une violation de l'article 3. Elle a noté que, telle qu'elle était rédigée à l'origine, la Convention ne visait pas à interdire la peine capitale. Toutefois, la pratique ultérieure des pays montre que peu de parties contractantes ont conservé la peine de mort, ce qui est reflété dans le Protocole No 6, qui prévoit l'abolition de la peine capitale mais que le Royaume-Uni n'a pas ratifié bien qu'il ait virtuellement aboli cette peine. Toutefois l'existence même du Protocole a conduit la Cour à conclure que l'article 3 n'avait pas évolué de telle manière qu'il pût être interprété comme interdisant la peine capitale...

En l'espèce, la Cour a conclu que les craintes de Soering d'être exposé au 'phénomène du quartier des condamnés à mort' n'étaient pas imaginaires... Le fait qu'un condamné soit soumis au régime sévère du quartier des condamnés à mort, dans une prison de haute sécurité, pendant six à huit ans, malgré l'existence de services psychologiques et psychiatriques, aggravait le problème... La Cour a été de surcroît influencée par l'âge et l'état mental de Soering. Celui-ci avait 18 ans au moment des faits, en 1985, et, eu égard à un certain nombre d'instruments internationaux interdisant l'application de la peine de mort à des mineurs ... la Cour a exprimé l'avis qu'il existe aujourd'hui un principe général selon lequel l'âge d'un condamné est un facteur important à prendre en considération... Un autre facteur que la Cour a estimé important en l'espèce était les expertises psychiatriques montrant que Soering souffrait de troubles mentaux au moment du crime. La Cour a également été influencée par le fait que l'extradition de Soering était demandée par la République fédérale d'Allemagne, dont la Constitution autorise les ressortissants à être jugés pour des infractions commises dans d'autres pays mais interdit la peine capitale. Soering pouvait donc être jugé pour ses crimes présumés sans être exposé au 'phénomène du quartier des condamnés à mort'."j

10.5 Le conseil conteste l'argument de l'Etat partie qui affirme que M. Kindler n'était pas mineur au moment des faits. "Il ne suffit pas de dire que M. Kindler n'est pas mineur et que l'infraction dont il est inculpé est grave parce que dans une société où des mineurs et des citoyens handicapés mentaux peuvent être exécutés, les chances d'obtenir la grâce sont à peu près inexistantes pour quelqu'un comme M. Kindler; or le droit de solliciter la grâce est un droit fondamental en vertu du Pacte."

10.6 Le conseil affirme en outre que le Ministre canadien de la justice n'a pas examiné la question du "phénomène du quartier des condamnés à mort" ni de la durée ou des conditions de détention dans le quartier des condamnés à mort.

10.7 Il indique certains travaux de droit et de sciences politiques favorables à l'abolition, qui sont pénétrés de l'horreur qu'inspire la seule pensée de l'exécution et la cruauté qui l'accompagne toujours.

10.8 Le fait que le Pacte prévoie la peine de mort pour les crimes graves n'empêche pas une évolution de l'interprétation ou du droit. "A l'heure actuelle, la peine de mort doit être considérée en soi comme un châtiment cruel et inusité et comme une violation des articles 6 et 7 du Pacte, sauf s'il s'agit des cas les plus horribles de crimes atroces; la peine de mort ne peut plus être considérée comme la peine normale en cas de meurtre; sauf dans les cas exceptionnels qui ont été mentionnés, le Pacte ne l'autorise donc pas. Dans ce contexte, l'exécution de M. Kindler représenterait en soi une violation des articles 6 et 7 du Pacte et M. Kindler n'aurait pas dû être extradé sans garanties."

10.9 En ce qui concerne l'argument du Gouvernement canadien qui ne veut pas devenir une terre d'asile pour les criminels étrangers, le conseil réplique que rien ne prouve que cela se produirait et que rien ne le prouvait non plus au moment où la procédure a eu lieu.

11. Pour ce qui est de la recevabilité de la communication, le conseil rejette les arguments de l'Etat partie qu'il estime dénués de fondement. En particulier, il déclare qu'il "n'est pas logique d'exclure l'extradition du champ d'application du Pacte, ni de demander que l'exécution soit certaine, ainsi que le Canada le suggère ... le droit n'a presque jamais affaire à des certitudes mais seulement à des probabilités et à des possibilités". Le conseil souligne qu'"il est bien évident que, pour ce qui est de la peine de mort, le système juridique des Etats-Unis n'est pas conforme au Pacte et que par conséquent s'il applique les principes qu'il a énoncés lui-même ..., le Canada aurait dû examiner toutes les questions soulevées par M. Kindler. L'Etat canadien ne peut donc pas faire valoir que la communication est irrecevable; M. Kindler a affirmé qu'il y avait eu des violations répétées du Pacte par le Canada, non par les Etats-Unis; le Canada n'a pas à se préoccuper de ce que le système en vigueur aux Etats-Unis puisse être indirectement mis en cause."


Révision de la décision de recevabilité et examen quant au fond


12.1 Dans la communication initiale, le conseil de l'auteur prétendait que M. Kindler était victime de violations des articles 6, 7, 9, 10, 14 et 26 du Pacte.

12.2 Quand le Comité a examiné, à sa quarante-cinquième session, la question de la recevabilité de la communication, il a conclu que certaines des allégations de l'auteur n'étaient pas fondées et étaient donc irrecevables; il a considéré de plus que la communication posait des questions nouvelles et complexes en ce qui concerne la compatibilité avec le Pacte, ratione materiae, de l'extradition dans le cas où l'intéressé risque la peine de mort, en particulier en ce qui concerne l'extension de la portée des articles 6 et 7 du Pacte à de telles situations et leur application concrète en l'espèce. Il a donc déclaré la communication recevable dans la mesure où elle pouvait soulever des questions au titre des articles 6 et 7 du Pacte. L'Etat partie a fait de nouvelles observations très circonstanciées, à la fois sur la recevabilité et sur le fond, et a demandé, conformément au paragraphe 4 de l'article 93 du règlement intérieur du Comité, que la décision de recevabilité soit réexaminée.

12.3 En réexaminant sa décision concernant la recevabilité, le Comité prend note des objections formulées par l'Etat partie et des arguments avancés par le conseil de l'auteur à cet égard. Il fait observer qu'en ce qui concerne le champ d'application des articles 6 et 7 du Pacte, sa jurisprudence ne permet pas de trancher les questions de recevabilité comme celles soulevées par la communication en question. En conséquence, le Comité estime qu'un examen du fond de l'affaire lui permettra de se prononcer sur le champ d'application de ces articles et de préciser l'applicabilité du Pacte et du Protocole facultatif à des affaires qui portent sur l'extradition vers un pays où l'intéressé risque la peine capitale.

13.1 Avant d'examiner le fond de l'affaire, le Comité fait observer que, comme il l'a indiqué dans sa décision de recevabilité, ce qui est en jeu ce n'est pas tant de savoir si les droits de M. Kindler ont été ou risquent d'être violés aux Etats-Unis, pays qui n'est pas partie au Protocole facultatif, mais si, en extradant M. Kindler vers les Etats-Unis, le Canada l'exposait à un risque réel de violation de ses droits au regard du Pacte. Il arrive souvent que les Etats qui sont parties au Pacte soient également parties à diverses obligations bilatérales, y compris celles qui relèvent des traités d'extradition. Un Etat qui est partie au Pacte est tenu de veiller à s'acquitter de tous ses autres engagements juridiques d'une manière qui soit compatible avec le Pacte. Le point de départ d'un examen de ce problème doit être l'obligation qui incombe à l'Etat partie en vertu du paragraphe 1 de l'article 2 du Pacte, à savoir de garantir à tous les individus se trouvant sur son territoire et relevant de sa compétence les droits reconnus dans le Pacte. Le droit à la vie est le plus essentiel de ces droits.

13.2 Si un Etat partie procède à l'extradition d'une personne relevant de sa juridiction dans des circonstances telles qu'il en résulte un risque réel pour que les droits de l'intéressé au regard du Pacte soient violés dans une autre juridiction, l'Etat partie lui-même peut être coupable d'une violation du Pacte.

14.1 En ce qui concerne une violation éventuelle de l'article 6 du Pacte par le Canada, du fait de sa décision d'extrader l'auteur, deux questions se posent, liées l'une à l'autre :

a) L'obligation, formulée dans le paragraphe 1 de l'article 6, de protéger le droit à la vie interdisait-elle au Canada d'exposer une personne relevant de sa juridiction au risque réel de perdre la vie en conséquence de l'extradition vers les Etats-Unis (conséquence nécessaire et prévisible) dans des circonstances incompatibles avec l'article 6 du Pacte?

b) Le fait que le Canada avait aboli la peine capitale sauf pour certaines infractions militaires obligeait-il le Canada à refuser l'extradition ou à demander aux Etats-Unis des assurances - comme il était en droit de le faire en vertu de l'article 6 du Traité d'extradition - selon lesquelles la peine de mort ne serait pas imposée contre M. Kindler?

14.2 En ce qui concerne le point a), le Comité rappelle son Observation générale concernant l'article 6 du Pactek, qui prévoit que, si les Etats parties ne sont pas tenus d'abolir totalement la peine capitale, ils doivent en limiter l'application. Il est signalé en outre dans l'Observation générale que les termes de l'article 6 laissent entendre aussi qu'il est souhaitable d'abolir la peine de mort. C'est là un objectif vers lequel les parties qui ont ratifié le Pacte devraient tendre : "... toutes les mesures prises pour abolir la peine de mort doivent être considérées comme un progrès vers la jouissance du droit à la vie". De plus, le Comité note l'évolution du droit international et la tendance à l'abolition, telles que l'illustre l'adoption, par l'Assemblée générale des Nations Unies, du deuxième Protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits civils et politiques. De surcroît, même lorsque la peine capitale est conservée par les Etats dans leur législation, un grand nombre d'entre eux ne l'appliquent pas en pratique.

14.3 Le Comité fait observer que le paragraphe 1 de l'article 6 doit être lu conjointement avec le paragraphe 2 de ce même article, qui n'interdit pas l'imposition de la peine de mort pour les crimes les plus graves. Le Canada lui-même n'a pas imposé la peine de mort à M. Kindler, mais l'a extradé aux Etats-Unis où il risquait la peine capitale. Si M. Kindler avait été exposé, du fait de l'extradition à partir du Canada, à un risque réel de violation du paragraphe 2 de l'article 6 aux Etats-Unis, cela aurait comporté une violation, par le Canada, des obligations de ce dernier pays au titre du paragraphe 1 de l'article 6. Parmi les exigences du paragraphe 2 de l'article 6 figure celle selon laquelle le châtiment capital ne peut être imposé que pour les crimes les plus graves, dans des circonstances qui ne soient pas en contradiction avec le Pacte et d'autres instruments, et selon laquelle la peine ne peut être appliquée qu'en vertu d'un jugement définitif rendu par un tribunal compétent. Le Comité note que M. Kindler a été déclaré coupable de meurtre avec préméditation, crime très grave sans aucun doute. Il avait plus de 18 ans quand le crime a été commis. L'auteur de la communication n'a jamais prétendu, ni devant les tribunaux canadiens ni devant le Comité, que la manière dont le procès avait été mené par le tribunal de Pennsylvanie constituait une violation du droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, qui lui était reconnu par l'article 14 du Pacte.

14.4 En outre, le Comité fait observer que M. Kindler a fait l'objet d'une mesure d'extradition vers les Etats-Unis à l'issue d'une procédure très complète devant les tribunaux canadiens, qui ont examiné tous les éléments de preuve qu'on leur avait soumis en ce qui concerne le procès et la déclaration de culpabilité de M. Kindler. Dans ces conditions, le Comité estime que les obligations découlant du paragraphe 1 de l'article 6 n'exigeaient pas que le Canada refuse l'extradition de l'auteur de la communication.

14.5 Le Comité note que le Canada a lui-même aboli la peine capitale, sauf pour certaines catégories d'infractions militaires; il n'est pas toutefois partie au deuxième Protocole facultatif se rapportant au Pacte. En ce qui concerne le point b), c'est-à-dire la question de savoir si les obligations contractées par le Canada en vertu du Pacte et le fait qu'il a aboli de manière générale la peine capitale exigeaient qu'il refuse l'extradition ou qu'il sollicite les assurances qu'il était en droit de demander en vertu du Traité d'extradition, le Comité note que l'abolition de la peine capitale ne libère pas le Canada des obligations qu'il a contractées en vertu de traités d'extradition. Toutefois, on doit en principe s'attendre à ce que, lorsqu'il exerce une faculté prévue dans un traité d'extradition (en l'occurrence la faculté de demander ou non l'assurance que la peine capitale ne sera pas imposée), un Etat qui a lui-même renoncé à la peine capitale doit tenir dûment compte, en prenant sa décision, de la politique qu'il a lui-même choisie. Ceci dit, le Comité fait observer que l'Etat partie a eu l'occasion d'indiquer que la faculté en question serait normalement exercée dans les cas où il existait des circonstances exceptionnelles. La possibilité de s'en prévaloir avait été examinée avec attention.

14.6 Les Etats doivent prendre en considération les différentes possibilités qui peuvent s'offrir en ce qui concerne la protection de la vie lorsqu'ils exercent la faculté prévue dans un traité d'extradition; toutefois, le Comité ne considère pas qu'aux termes de l'article 6 du Pacte, le Canada soit nécessairement tenu de refuser l'extradition ou de demander des assurances. Le Comité note que l'extradition de M. Kindler aurait violé les obligations contractées par le Canada en vertu de l'article 6 du Pacte si la décision d'extrader sans avoir obtenu des assurances avait été prise arbitrairement ou sommairement. Or les éléments de preuve dont dispose le Comité font apparaître que le Ministre de la justice est arrivé à une décision après avoir entendu les arguments favorables à des démarches visant à obtenir lesdites assurances. Le Comité prend note, en outre, des raisons invoquées par le Canada pour ne pas demander d'assurances dans le cas de M. Kindler, en particulier l'absence de circonstances exceptionnelles, le fait de pouvoir compter sur une procédure régulière et le fait qu'il importait de ne pas fournir de refuge sûr aux personnes accusées de meurtre ou déclarées coupables de ce crime.

15.1 En ce qui concerne l'allégation de l'auteur selon laquelle le Canada aurait violé l'article 7 du Pacte, il y a lieu de noter que cette disposition doit être interprétée à la lumière d'autres dispositions du Pacte, y compris le paragraphe 2 de l'article 6, qui n'interdit pas l'imposition de la peine de mort dans certaines circonstances limitées. En conséquence, la peine capitale en tant que telle, à l'intérieur des paramètres du paragraphe 2 de l'article 6, ne constitue pas par elle-même une violation de l'article 7.

15.2 Quant à la question de savoir si le "phénomène du quartier des condamnés à mort", phénomène lié à la peine capitale, constitue une violation de l'article 7, le Comité rappelle sa jurisprudence selon laquelle "des périodes prolongées de détention dans des conditions sévères, dans un quartier de condamnés à mort, ne peuvent être considérées comme constituant un traitement cruel, inhumain ou dégradant si le condamné se prévaut simplement des recours en appel"l. Le Comité a eu l'occasion d'indiquer qu'il faut impérativement examiner les faits et les circonstances propres à chaque cas afin de déterminer si un problème se pose au titre de l'article 7.

15.3 Pour déterminer si, dans telle ou telle affaire, l'imposition de la peine capitale pourrait constituer une violation de l'article 7, le Comité considère les facteurs personnels pertinents relatifs à l'auteur de la communication, les conditions précises de détention dans le quartier des condamnés à mort et la question de savoir si la méthode d'exécution envisagée est particulièrement horrible. Dans ce contexte, le Comité a jusqu'ici accordé une grande attention à l'arrêt rendu par la Cour européenne des droits de l'homme dans l'affaire Soering c. Royaume-Unim. Il note que plusieurs faits importants dont l'existence a conduit à l'arrêt de la Cour européenne étaient fort différents, sur des points essentiels, des faits de la présente affaire. En particulier, les faits diffèrent en ce qui concerne l'âge et l'état mental du délinquant et les conditions de détention dans le quartier des condamnés à mort dans les systèmes pénitentiaires respectifs. Le conseil de l'auteur n'a pas présenté d'observations particulières sur les conditions de détention en Pennsylvanie ou sur la possibilité d'un retard prolongé dans l'exécution de la peine ou sur les effets d'un tel retard; il n'a pas non plus présenté d'observations sur le mode d'exécution. Le Comité a également eu l'occasion de noter qu'il y avait dans l'affaire Soering - et il n'en est pas ainsi dans la présente affaire - une demande simultanée d'extradition émanant d'un Etat dans lequel la peine de mort ne serait pas imposée.

16. En conséquence, le Comité conclut que les faits, tels qu'ils lui ont été soumis en l'espèce, ne révèlent pas de violation de l'article 6 du Pacte par le Canada. Il conclut également que les faits de la cause ne révèlent pas de violation de l'article 7 du Pacte par le Canada.

17. Le Comité exprime le regret que l'Etat partie n'ait pas accédé à la demande que le Rapporteur spécial lui a adressée en vertu de l'article 86 du règlement intérieur du Comité à l'occasion de l'enregistrement de la communication le 26 septembre 1991.

18. Le Comité des droits de l'homme, agissant en vertu des dispositions du paragraphe 4 de l'article 5 du Protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits civils et politiques, estime que les faits qui lui ont été exposés ne révèlent pas de violation par le Canada de l'une quelconque des dispositions du Pacte international relatif aux droits civils et politiques.

[Texte établi en anglais (version originale) et traduit en espagnol et en français.]


Suite : le texte des six opinions individuelles (dissidentes et concordantes), signées par sept membres du Comité.





Notes

a Leo Hertzberg et consorts c. Finlande, constatations adoptées le 2 avril 1982, par. 9.3.

b H. v.d.P. c. Pays-Bas, déclarée irrecevable le 8 avril 1987, par. 3.2.

c M. A. c. Italie, déclarée irrecevable le 10 avril 1984, par. 13.4.

d Adopté lors du huitième Congrès des Nations Unies pour la prévention du crime et le traitement des délinquants, La Havane, 1990; voir la résolution 45/168 de l'Assemblée générale, en date du 14 décembre 1990.

e Communication No 117/1981 [M. A. c. Italie], par. 13.4 : "Aucune disposition du Pacte n'interdit à un Etat partie de solliciter l'extradition d'une personne d'un autre pays."

f Aumeeruddy-Cziffra et consorts c. Maurice (No 35/1978, constatations adoptées le 9 avril 1981) et Torres c. Finlande (No 291/1988, constatations adoptées le 2 avril 1990).

g Communications Nos 210/1986 et 225/1987 (Earl Pratt et Ivan Morgan c. Jamaïque); constatations adoptées le 6 avril 1989, par. 13.6.

h Communications Nos 270/1988 et 271/1988 (Randolph Barrett et Clyde Sutcliffe c. Jamaïque); constatations adoptées le 30 mars 1992, par. 8.4.

i Voir appendice sous A.

j Gino J. Naldi, Death Row Phenomenon Held Inhuman Treatment, The Review (Commission internationale de juristes), décembre 1989, p. 61 et 62.

k Observation générale No 6 [16], du 27 juillet 1982, par. 6.

l Howard Martin c. Jamaïque, communication No 317/1988, constatations adoptées le 24 mars 1993, par. 12.2.

m Cour européenne des droits de l'homme, arrêt du 7 juillet 1989.

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