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Peine de mort : des experts de l'ONU exhortent la Mauritanie à abroger la loi anti-blasphème

communiqué de presse du 7 juin 2018 - Organisation des Nations Unies
Pays :
peine de mort / Mauritanie
GENÈVE (7 juin 2018) - Un groupe d'experts des droits de l'homme* a exhorté les autorités mauritaniennes à reconsidérer l'adoption d'un amendement du Code pénal qui prévoit la peine de mort pour blasphème et apostasie, une disposition qui viole gravement, selon eux, le droit international.

L'article 306 du Code pénal, tel que révisé, prévoit que tout musulman coupable d'apostasie ou de blasphème sera condamné à mort dès son arrestation sans possibilité de formuler une demande de clémence fondée sur le repentir. L'article précédent imposait la peine de mort pour apostasie et blasphème, mais exigeait des peines de prison en cas de repentance. L'amendement a été adopté par le Parlement le 27 avril 2018 et est en attente de promulgation.

« Nous sommes scandalisés par la décision des autorités mauritaniennes de réserver la peine de mort à l'encontre de celles et ceux qui expriment leurs droits à la liberté d'expression, de religion et de croyance, alors même que le droit international interdit la criminalisation de l'apostasie et du blasphème ».

« Cette révision va museler davantage la liberté d'expression en Mauritanie et ouvrir la voie à l'incitation à la discrimination, à l'hostilité ou à la violence contre des personnes, sur la base de la religion ou des croyances. Il existe un risque supplémentaire que l'article 306 soit appliqué de manière discriminatoire à l'encontre de personnes de différentes confessions. De plus, l'article révisé avance un programme fondamentaliste qui met gravement en danger les droits de l'homme et encourage l'extrémisme ».

« Pour les États qui n'ont pas aboli la peine de mort, celle-ci ne peut être imposée que pour les crimes les plus graves impliquant des meurtres intentionnels », ont-ils avancé, ajoutant que « la peine de mort obligatoire constitue une violation directe du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, ainsi qu'une privation arbitraire de la vie ».

Les experts ont exhorté les autorités mauritaniennes à ne pas promulguer l'article 306 révisé du Code pénal et à le réexaminer afin de le mettre en conformité avec les normes internationales du droit des droits de l'homme.



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* M. David Kaye, Rapporteur spécial sur la promotion et la protection du droit à la liberté d'opinion et d'expression; Mme. Agnès Callamard, Rapporteuse spéciale sur les exécutions sommaires ou extrajudiciaires ; M. Ahmed Shaheed, Rapporteur spécial sur la liberté de religion ou de conviction ; Mme. Karima Bennoune, Rapporteuse spéciale dans le domaine des droits culturels.

Les Rapporteurs spéciaux font partie de ce qu'on appelle les procédures spéciales du Conseil des droits de l'homme. Les procédures spéciales qui constituent le plus grand groupe d'experts indépendants dans le système des Nations Unies des droits de l'homme, sont les mécanismes indépendants d'enquête et de surveillance du Conseil qui traitent, soit de situations spécifiques de pays ou de questions thématiques dans toutes les régions du monde. Les experts des procédures spéciales travaillent sur une base volontaire; ils ne sont pas fonctionnaires de l'ONU et ne reçoivent pas un salaire pour leur travail. Ils sont indépendants de tout gouvernement ou organisation et siègent à titre individuel.
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