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Bangladesh: un islamiste de l'opposition condamné à mort pour génocide

dépêche de presse du 9 mai 2013 - Agence mondiale d'information - AFP
Pays :
peine de mort / Bangladesh
DACCA - Une figure islamiste de l'opposition au Bangladesh a été condamnée à mort jeudi par un tribunal spécial pour son rôle-clé dans le massacre d'au moins 120 paysans au cours de l'un des plus sanglants épisodes de la lutte pour l'indépendance du pays menée contre le Pakistan en 1971.

Mohammad Kamaruzzaman, secrétaire général adjoint du parti radical Jamaat-e-Islami, a été jugé coupable de génocide, torture, enlèvements et crimes contre l'humanité par le très controversé Tribunal international des crimes (ICT), situé à Dacca. Il est le troisième homme politique à être condamné.

Ce verdict risque d'aggraver les tensions entre le gouvernement laïc de ce pays à majorité musulmane et les religieux radicaux. Des centaines de manifestants laïcs qui s'étaient massés à une intersection du centre de Dacca ont toutefois salué la décision à grands cris.

Il a été condamné à la mort par pendaison pour des charges incluant celle de génocide, a déclaré à l'AFP le procureur général, Mahbubey Alam. Du fait de son rôle abominable, de nombreuses personnes ont été assassinées et de nombreuses femmes ont été violées, a-t-il ajouté.

L'intéressé a qualifié le verdict de mauvais jugement.

Selon l'accusation, Kamaruzzaman était l'organisateur en chef de la milice pro-pakistanaise Al Badr accusée d'avoir tué des milliers de personnes pendant les neuf mois de la sanglante guerre d'indépendance, qui a abouti à la naissance du Bangladesh, jusqu'à alors province du Pakistan baptisée Pakistan oriental.

La charge de génocide est liée à l'exécution d'au moins 120 paysans non-armés dans un village du nord du Bangladesh, Sohagpur, connu depuis cet épisode sous le nom de village des veuves.

Trois des veuves de ces paysans pro-indépendance ont témoigné contre Kamaruzzaman lors du procès au cours duquel l'accusation a détaillé comment il avait mené les troupes gouvernementales pakistanaises à ce village.

Les soldats avaient traîné les paysans jusqu'à une rizière, les avaient alignés avant de les exécuter.

Mohammad Jalal Uddin, un paysan qui a perdu sept membres de sa famille élargie dans ce massacre, s'est félicité du verdict: J'ai perdu mon père, mon oncle et d'autres proches. Ma mère et ma tante sont mortes sans avoir obtenu justice mais au moins moi je l'ai eue, a-t-il dit à l'AFP par téléphone.

Les avocats de la défense ont jugé les charges sans fondement, affirmant que les chances de prouver l'innocence de leur client avaient été entravées par le fait que la défense ne pouvait citer que cinq témoins en faveur de l'accusé.

L'ICT a été mis en place en mars 2010 et baptisé ainsi en dépit de l'absence de toute supervision d'une institution internationale.

Depuis le premier verdict le 21 janvier, 150 personnes ont trouvé la mort lors de heurts entre les forces de l'ordre et des membres du Jamaat-e-Islami qui accusent le pouvoir d'avoir créé le tribunal pour des motifs politiques, la plupart des personnes poursuivies appartenant au principal parti d'opposition, le BNP, et ses alliés islamistes.

Un groupe d'enquête privé a identifié 1.175 personnes --parmi lesquelles des généraux pakistanais et des islamistes alliés d'Islamabad à l'époque-- soupçonnées d'avoir commis divers crimes lors de la guerre de 1971, tels des meurtres, viols et conversions forcées d'hindous à l'islam.

Selon le gouvernement du parti de l'Awami League, la guerre de 1971 a fait trois millions de morts. Des chiffres d'instances indépendantes estiment que le bilan s'élève à entre 300.000 et 500.000 morts.
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