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Peine de mort pour les mineurs: la Cour Suprême plutôt sceptique

dépêche de presse du 13 octobre 2004 - Agence mondiale d'information - AFP
Pays :
peine de mort / Etats-Unis
Thème :
La Cour Suprême s'est montrée divisée mercredi sur la question de la peine de mort imposée aux mineurs de 16 ou 17 ans, même si une majorité semblait pencher vers l'abolition de cette pratique.

La plus haute cour de justice américaine, qui devra rendre une décision d'ici l'été 2005, a débattu de l'évolution de la société américaine face à ce châtiment mais aussi du fait que les Etats-Unis restent l'un des rares pays dans le monde à l'imposer.

Des écrits précédents de la Cour laissent entrevoir que les quatre juges les plus progressistes condamnent ce qu'ils ont décrit comme une "pratique honteuse". Les trois juges les plus conservateurs ont en revanche montré mercredi qu'ils y restaient plutôt favorables.

Comme souvent, l'attention s'est concentrée sur les questions posées par les deux juges "centristes", Sandra O'Connor et Anthony Kennedy, qui s'étaient tous deux prononcés en 2002 contre l'exécution d'attardés mentaux, une affaire à laquelle la Cour a fait référence à plusieurs reprises mercredi.

Les abolitionnistes espèrent que la Cour prendra une décision similaire, en invoquant le 8ème amendement à la Constitution qui interdit tout "châtiment cruel ou disproportionné".

La Cour interdit déjà depuis 1988 l'exécution de jeunes de moins de 16 ans, mais quelques rares Etats continuent à exécuter des jeunes ayant commis des crimes aux âges de 16 ou 17 ans.

Le cas soumis à la Cour était celui de Christopher Simmons, condamné en 1993 pour avoir tué, à l'âge de 17 ans, une femme qu'il avait ligotée avant de la jeter vivante du haut d'un pont.

"Il existe des gens de 17 ans tout aussi coupables que d'autres âgés de 18 ans", a déclaré d'emblée James Layton, avocat représentant l'Etat du Missouri qui cherche à imposer son exécution.

Le juge Ruth Ginsburg l'a interrompu pour rappeler que les moins de 18 ans "n'ont pas le droit d'acheter du tabac ou de voter". "Comment peut-on être éligible à la peine de mort tout en n'étant pas considéré comme un membre adulte de la société ?", a-t-elle interrogé.

Le juge O'Connor a comparé l'évolution de la société contre les exécutions de mineurs à celle constatée au sujet de l'exécution des retardés mentaux.

"Cette tendance n'est pas inexorable", a contesté M. Layton, estimant que si le nombre d'éxécutions de mineurs avait baissé ces dernières années, rien ne permettait de prévoir qu'il ne remonterait pas à l'avenir.

Le juge Kennedy s'est inquiété que l'abolition des exécutions de jeunes criminels fasse disparaître le pouvoir de dissuasion de la peine capitale, notamment auprès des membres de gangs.

L'avocat de M. Simmons, Seth Waxman, a estimé que la peine de mort était précisément inutile à toute dissuasion dans la mesure où les adolescents "n'évaluent pas les riques comme des adultes".

Le juge Kennedy a demandé par ailleurs s'il ne fallait pas prendre en compte la désapprobation mondiale à l'égard des Etats-Unis sur la question de l'exécution de mineurs. "Non", a répondu catégoriquement M. Layton.

"Vous ne pensez pas que cela a une pertinence?", a insisté le juge Stephen Breyer. Il s'est défendu de vouloir donner aux autres pays le droit d'imposer leur loi, faisant ainsi curieusement écho aux débats de la campagne présidentielle américaine.

"Ce que nous faisons ici devrait influencer le reste du monde", a affirmé le juge Kennedy. Et sa consoeur O'Connor d'ajouter que Thomas Jefferson, l'un des rédacteurs de la Constitution, "pensait que pour mener le monde, il faut montrer un respect raisonnable de l'humanité".
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