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L'abus des lois antiterroristes menace les droits humains, avertit un expert de l'ONU

communiqué de presse du 12 mars 2024 - Organisation des Nations Unies
Des lois antiterroristes utilisées de manière délibérée et l'abus généralisé de telles lois menacent les droits de l'homme dans le monde entier, a averti mardi un expert indépendant de l'ONU.

Dans son premier rapport au Conseil des droits de l'homme, le Rapporteur spécial sur les droits de l'homme dans la lutte antiterroriste a dépeint un paysage antiterroriste parsemé de violations des droits de l'homme. Il s'agit notamment d'exécutions illégales, de détentions arbitraires, de tortures, de procès inéquitables, d'atteintes à la vie privée dues à la surveillance de masse et de criminalisation des libertés d'expression, de réunion, d'association et de participation à la vie politique.

Outre qu'il entraîne des violations des droits des personnes soupçonnées de terrorisme, le recours abusif aux mesures antiterroristes peut délibérément ou non mettre en péril les libertés garanties aux innocents, selon Ben Saul.

Des lois utilisées contre les dissidents politiques

« L'utilisation abusive des mesures antiterroristes ne viole pas seulement les droits des criminels présumés, mais peut également mettre en péril les libertés des innocents », a déclaré dans un communiqué, M. Saul.

Plus de vingt ans d'efforts prolifiques au niveau mondial pour lutter contre le terrorisme n'ont pas été accompagnés d'un engagement tout aussi solide en faveur des droits de l'homme. Selon l'Expert onusien, des lois antiterroristes ont été utilisées de manière « délibérée et discriminatoire contre les opposants et les dissidents politiques, les médias, la société civile et les minorités ».

M. Saul a ainsi condamné l'instrumentalisation rampante d'infractions terroristes trop larges contre la société civile, notamment les opposants politiques, les militants, les défenseurs des droits de l'homme, les journalistes, les minorités et les étudiants.

L'état d'urgence injustifié et prolongé continue de porter atteinte aux droits de l'homme, a averti l'expert.

Une surveillance « de masse »

De plus, la surveillance de masse, notamment en ligne, a empiété sur le droit à la vie privée et d'autres droits.

Des procédures pénales ont été entachées par des arrestations arbitraires, des détentions provisoires excessivement longues, le recours à la torture et à d'autres mauvais traitements

Il a également pointé du doigt l'obtention d'aveux par la contrainte, la restriction de l'accès à un avocat, la non-divulgation d'éléments de preuve secrets, le recours à des tribunaux d'exception, la comparution d'enfants devant des tribunaux pour adultes et l'application illégale de la peine de mort.

Sur un autre plan, la violence militaire excessive en réponse au terrorisme détruit également les droits fondamentaux, notamment par des violations du droit international humanitaire et du droit pénal international.

« Les États ont de plus en plus recours à la violence militaire transfrontalière, même lorsque celle-ci n'est pas justifiée par le droit international de la légitime défense », a fait valoir M. Saul.

« De nombreux États n'ont pas non plus réussi à s'attaquer aux causes profondes du terrorisme, notamment aux violations des droits de l'homme commises par les États, alors que l'impunité pour ces violations est endémique », a-t-il pointé.

La menace de la montée de l'autoritarisme

Plus globalement, les droits de l'homme dans la lutte contre le terrorisme sont davantage menacés par la montée de l'autoritarisme, la polarisation intérieure et l'extrémisme croissants, la concurrence géopolitique, les dysfonctionnements du Conseil de sécurité et les nouveaux outils, y compris les médias sociaux, qui alimentent la déshumanisation, la diffamation, l'incitation et la désinformation, a déploré M.Saul.

« Les États doivent aller au-delà des engagements rhétoriques en faveur des droits de l'homme et placer ces derniers au cœur de toutes les mesures de lutte contre le terrorisme », a-t-il insisté.

Annonçant ses priorités pour son mandat de trois ans, le Rapporteur spécial a déclaré qu'il veillerait à ce que les États soient tenus pour responsables des violations massives des droits de l'homme résultant de la lutte contre le terrorisme.

M. Saul poursuivra également les efforts de son prédécesseur pour empêcher l'utilisation abusive des mesures antiterroristes contre la société civile, protéger les 70.000 personnes détenues arbitrairement dans le nord-est de la Syrie dans le cadre du conflit contre ISIL, protéger les détenus et les personnes transférées du centre de détention de Guantánamo Bay, à Cuba.
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