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Un détenu veut être condamné à mort sans procès

dépêche de presse du 9 avril 2007 - Associated Press - AP
Pays :
peine de mort / Etats-Unis
Ce n'est pas la première fois aux Etats-Unis qu'un condamné à mort demande l'exécution de la sentence. Mais la décision de Marco Allen Chapman pose un cas de conscience à la justice: ce meurtrier renonce même au procès, au point d'inquiéter certains experts en droit, qui évoquent un "suicide par tribunal interposé".

Le détenu a plaidé coupable en décembre 2004 du meurtre en 2002 de Cody et Chelbi Sharon, âgés de six et sept ans, dans leur maison de Warsaw, dans le nord du Kentucky. Il a également reconnu avoir poignardé Courtney Sharon, dix ans, puis violé et tenté de tuer leur mère Carolyn Marksberry. Un juge a accepté sa demande d'exécution.

Mais, selon ses propres avocats, l'accusé cherche à utiliser le système judiciaire pour mettre fin à ses jours. Jeudi, la Cour suprême du Kentucky doit entendre les arguments sur la légalité de sa demande, comme le prévoit automatiquement la procédure d'appel dans toutes les affaires de peine capitale.

L'affaire est plus qu'inhabituelle, l'accusé et l'accusation se retrouvant dans le même camp pour réclamer la peine de mort. Les avocats de Marco Chapman cherchent pour leur part à lui éviter une exécution.

"C'est le pire cauchemar d'un avocat de la défense", commente Michael Mello, professeur de droit à l'Université du Vermont et ancien avocat de condamnés à mort en Floride. Ex-représentant du tueur en série Ted Bundy, il considère cependant que la décision en revient à l'homme qui se trouve dans le couloir de la mort, pourvu qu'il soit pénalement responsable.

Ce n'est pas la première fois qu'un condamné à mort demande l'exécution de sa peine. En 1977, Gary Mark Gilmore avait renoncé à ses appels et avait été abattu par un peloton d'exécution dans l'Utah. Depuis, 124 détenus dans 26 des 38 Etats appliquant la peine capitale ont renoncé à leur appel et accepté de mourir, selon le Centre d'information sur la peine de mort à Washington.

Michael Hoffheimer, professeur de criminalité à l'Université du Mississippi, s'inquiète des conséquences d'un tel scénario parce qu'il supprime les multiples protections légales indispensables pour s'assurer que seule une personne coupable et pénalement responsable est condamnée à mort. Sinon, il est possible d'exécuter une personne qui ne serait pas coupable mais suicidaire, poursuit-il. "Autoriser les accusés à prendre des décisions qui augmentent le risque d'erreurs judiciaires est une mauvaise politique."

Pour John Blume, professeur de droit à l'Université Cornell, la culpabilité des accusés demandant l'exécution de leur sentence ne doit laisser aucune place au doute. Les tribunaux doivent également s'assurer que les accusés "ne souhaitent pas mettre fin à leur vie" mais qu'ils sont prêts à "accepter la responsabilité pour leurs crimes".

Les avocats commis d'office de Marco Chapman, MMes Donna Boyce et Randall Wheeler, et Vicki Glass, porte-parole des services du procureur du Kentucky, ont refusé de s'exprimer sur cette affaire.

Dans un dossier remis à la cour, MMes Donna Boyce et Randall Wheeler affirment que leur client souffrait d'une dépression et a utilisé le tribunal pour se donner la mort. Ils réclament la tenue d'une nouvelle audience, soulignant que l'homme a depuis reçu des soins. "Marco Chapman se suicide", écrivent les deux avocats.
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