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Les droits de l'homme et la democratie au coeur de l'action exterieure de l'UE - vers une approche plus efficace

COM(2011) 886 final
communiqué de presse du 12 décembre 2011 - Union européenne
COMMISSION EUROPÉENNE
LA HAUTE REPRÉSENTANTE DE L'UNION EUROPÉENNE POUR LES AFFAIRES ÉTRANGÈRES ET LA POLITIQUE DE SÉCURITÉ
Bruxelles, le 12.12.2011

COMMUNICATION CONJOINTE AU PARLEMENT EUROPÉEN ET AU CONSEIL LES DROITS DE L'HOMME ET LA DEMOCRATIE AU COEUR DE L'ACTION EXTERIEURE DE L'UE - VERS UNE APPROCHE PLUS EFFICACE

Tous les droits de l'homme – qu'ils soient civils, politiques, économiques, sociaux et culturels – sont universels, sans distinction de personne ni de lieu. Le respect des droits de l'homme et des libertés fondamentales est une des pierres angulaires de l'Union européenne. La protection et la promotion des droits de l'homme est un fil rouge qui parcourt l'action de l'UE tant sur son territoire qu'à l'extérieur. Compte tenu des normes et des valeurs qu'elle cherche à promouvoir, l'UE se doit de défendre les principes relatifs aux droits de l'homme et à la démocratie en faisant preuve de créativité et d'une détermination sans faille en vue d'obtenir des résultats concrets.

La présente communication vise à engager un débat avec les autres institutions européennes sur les moyens de rendre la politique extérieure de l'Union européenne en matière de démocratie et de droits de l'homme plus dynamique, plus cohérente et plus efficace. Pour que l'UE passe à la vitesse supérieure en termes d'efficacité, elle présente un projet relatif à l'élargissement, l'approfondissement et la rationalisation de l'action de l'UE sur la scène internationale en vue de produire un réel changement dans la vie des citoyens.

La présente communication propose d'agir dans quatre domaines – mécanismes de mise en œuvre, intégration des politiques, mise en place de partenariats et mesures visant à parler d'une seule voix. Elle sollicite l'avis du Conseil et du Parlement européen sur la manière de mettre à profit les possibilités qui s'offrent à elle et de relever les défis. Elle fournit des orientations pour recueillir des avis et des témoignages, provenant notamment d'autres parties intéressées, en vue de renforcer la stratégie extérieure de l'UE en matière de droits de l'homme.

«L'action de l'Union sur la scène internationale repose sur les principes qui ont présidé à sa création, à son développement et à son élargissement et qu'elle vise à promouvoir dans le reste du monde: la démocratie, l'État de droit, l'universalité et l'indivisibilité des droits de l'homme et des libertés fondamentales, le respect de la dignité humaine, les principes d'égalité et de solidarité et le respect des principes de la charte des Nations unies et du droit international.»
Traité sur l'Union européenne, article 21


Contexte: l'UE en tant que force mondiale au service des droits de l'homme



Dix ans se sont écoulés depuis la communication de la Commission du 8 mai 2001 sur «Le rôle de l'Union européenne dans la promotion des droits de l'homme et de la démocratisation dans les pays tiers». Depuis lors, le monde a connu plusieurs bouleversements, allant des attentats du 11 septembre 2001 au Printemps arabe. Les événements qui se sont déroulés en 2011 au Moyen-Orient et en Afrique du Nord démontrent l'importance capitale des droits de l'homme et de la démocratie. Il importe désormais que l'UE renouvelle ses efforts en vue d'apporter une réponse efficace aux défis auxquels doivent faire face les droits de l'homme et la démocratie dans le monde entier.

Dans le cadre de son action extérieure, l'UE a élaboré un large éventail d'instruments et de lignes directrices stratégiques afin de mettre en pratique son engagement en faveur des droits de l'homme et de la démocratie, en collaboration avec les États membres de l'UE et le Parlement européen, ainsi qu'avec la société civile. Plusieurs lignes directrices adoptées par le Conseil (ainsi qu'une panoplie d'outils et des instruments similaires) guident l'action de l'UE sur les principales questions en matière de droits de l'homme telles que la peine de mort, la lutte contre la torture, la protection des défenseurs des droits de l'homme, la liberté de religion ou de conviction, les droits des enfants ou des femmes ou encore l'orientation sexuelle. Un programme d'action a établi un nouveau socle pour la réponse apportée par l'UE dans le domaine du soutien à la démocratie.

S'appuyant sur ce nouveau socle, l'Union européenne a évoqué avec d'autres pays la question des droits de l'homme et de la situation des personnes menacées, dans le cadre de dialogues et de consultations sur les droits de l'homme – dont le nombre ne cesse de croître – de rencontres politiques, de démarches diplomatiques et aussi dans la sphère publique. Elle a fourni des conseils et une aide en matière de renforcement des institutions démocratiques et des droits de l'homme et est intervenue pour imposer des mesures restrictives en raison de graves violations des droits de l'homme. Une interaction étroite avec la société civile et un soutien en faveur de celle-ci constituent un élément clé de l'action de l'UE.

L'UE a également joué un rôle de premier plan dans la mise en place, au sein des Nations unies, du Conseil de l'Europe et de l'OSCE, de normes et de mécanismes forts pour la promotion et la protection des droits de l'homme. Elle a œuvré avec d'autres organisations et d'autres partenaires afin de veiller à ce que les Nations unies prennent des mesures pour remédier aux graves violations des droits de l'homme dans certains pays spécifiques et a abordé avec eux les principales questions relatives aux droits de l'homme.

L'UE a, de son propre chef, mis les droits de l'homme au cœur de sa politique d'élargissement, régie par les critères de Copenhague.

La déclaration universelle des droits de l'homme établit des normes internationales pour tous les États membres des Nations unies. Chaque État membre des Nations unies est partie à au moins un des six principaux traités relatifs aux droits de l'homme s'inspirant de cette déclaration et 80 % des États en ont ratifié quatre ou plus. Le processus de ratification se poursuit à un rythme régulier. Dans le domaine des droits de l'homme et des droits du travail, de nombreux pays ont ratifié les huit conventions fondamentales de l'OIT sur le travail, notamment tous les États membres de l'UE. S'il existe donc bel et bien un cadre juridique global, le véritable défi réside dans sa mise en œuvre.

L'UE œuvre en faveur des droits de l'homme à l'intérieur et à l'extérieur de ses frontières, estimant qu'ils sont indispensables pour assurer la justice sociale et la dignité des personnes ainsi que pour promouvoir la paix, la prospérité et la stabilité au niveau international.

Les défis à relever



Au cours de ces dernières années, plusieurs difficultés se sont fait jour. Tout d'abord, la légitimité des normes et des règles internationales relatives aux droits de l'homme et à la démocratie a été remise en question, parfois par des puissances émergentes avec lesquelles l'UE cherche à coopérer. Aux Nations unies, certains États membres ont contesté le bien- fondé de normes établies de longue date, ce qui laisse penser – à tort – que les violations des droits de l'homme peuvent se justifier par des différences culturelles. Des lois sur le blasphème ont été invoquées pour restreindre la liberté d'expression. La crise économique actuelle a provoqué un nouveau glissement au niveau de l'économie mondiale, ce qui a conduit certains, à leur tour, à remettre en question l'universalité et l'utilité des droits de l'homme. Lorsque l'UE œuvre en faveur des droits de l'homme dans des domaines tels que l'abolition de la peine de mort ou l'orientation sexuelle, elle doit souvent affronter des vents contraires.

Même si les règles internationales sont généralement acceptées, leur mise en œuvre au niveau national est souvent encore trop lente. Les femmes et les filles continuent de faire l'objet de discriminations et de violence. Les discriminations liées à l'orientation ou à l'identité sexuelle sont monnaie courante. Les progrès accomplis ces dix dernières années pour éradiquer la torture et les traitements inhumains ou pour protéger et promouvoir les des droits de l'enfant n'ont pas été suffisants. L'UE a joué un rôle décisif dans l'élaboration de la convention des Nations unies relative aux droits des personnes handicapées, à laquelle elle est désormais pleinement partie, mais des difficultés considérables devront encore être surmontées pour en assurer la mise en œuvre intégrale.

Par ailleurs, d'aucuns ont le sentiment que les politiques intérieures ou extérieures de l'UE ne sont pas toujours tout à fait à la hauteur des déclarations de celle-ci en matière de droits de l'homme et de démocratie. Dans le contexte du Printemps arabe, par exemple, la question de savoir si l'UE s'était suffisamment engagée pour soutenir la société civile et promouvoir le changement plutôt que de la stabilité a fait débat. Parallèlement, le bilan de l'UE en matière de droits de l'homme sur son propre territoire suscite de plus en plus de critiques.

En dernier lieu, la mondialisation a entraîné de nouvelles difficultés pour la promotion des droits de l'homme. L'internationalisation et l'interdépendance toujours croissante des économies ont fait apparaître de nouveaux acteurs, entraînant dans leur sillage des retombées complexes dans le domaine des droits de l'homme. Alors que les obligations liées aux droits de l'homme incombent traditionnellement aux États, les violations en la matière sont d'origines plus diverses, qu'il s'agisse des peuples indigènes spoliés de leurs terres ou de l'exportation de nouvelles technologies utilisées à des fins de censure et de surveillance. Alors que dans de nombreux pays la mondialisation a contribué à améliorer le sort d'un grand nombre de personnes, les faisant sortir de la pauvreté et conduisant à une ouverture de la société, elle est accusée, dans d'autres, d'exacerber les inégalités et d'aggraver la discrimination et l'exploitation.

La réponse de l'UE



L'UE n'a pas toujours agi de manière aussi efficace ni aussi coordonnée qu'elle aurait pu. Il importe désormais de garantir la clarté, la cohérence et l'efficacité des politiques, en agissant de manière plus réfléchie et stratégique. Cet impératif est d'autant plus pressant que le traité de Lisbonne inscrit les droits de l'homme, la démocratie et l'État de droit au centre de toute l'action extérieure de l'UE et établit qu'il convient de veiller à la cohérence entre les différents domaines couverts par l'action extérieure et la mise en œuvre des principes présidant à la politique étrangère de l'UE.

Les principaux éléments d'un cadre stratégique sont présentés ci-après – les perspectives et actions proposées peuvent être enrichies par l'expérience et les points de vue des institutions européennes.

L'UE devrait continuer de se fixer comme objectif d'éviter les violations des droits de l'homme et, lorsqu'elles ont lieu, de faire en sorte que les victimes aient accès à la justice et à des moyens de recours et que les responsables répondent de leurs actes.

L'Union européenne devrait ainsi réaffirmer son engagement en faveur de l'universalité, de l'indivisibilité et de l'interdépendance de tous les droits de l'homme – qu'ils soient civils, politiques, économiques, sociaux ou culturels. Le respect des droits de l'homme est un principe consacré par la déclaration universelle des droits de l'homme, la charte des Nations unies et les traités internationaux relatifs aux droits de l'homme.
La démocratie est une valeur universelle fondée sur la volonté librement exprimée des peuples de déterminer leurs propres systèmes politiques. Les droits de l'homme et la démocratie sont indissociables des libertés de participation – liberté d'expression, d'association et de réunion – qui sous-tendent la démocratie. Un événement tel que le Printemps arabe montre une fois de plus que la liberté ne peut être confisquée.

L'UE estime que la protection des droits de l'homme et des principes démocratiques passe par le respect de l'État de droit, y compris l'accès à la justice et le droit à un procès équitable.

L'UE devrait s'engager à promouvoir et à protéger la liberté, la dignité, l'égalité et la justice pour tous et à en faire une priorité essentielle de sa politique étrangère. Les droits de l'homme et la démocratie doit parcourir, tel un fil rouge, l'ensemble des politiques extérieures de l'UE. La promotion de ces objectifs est une condition importante pour la réussite d'autres objectifs, tels que la sécurité, le développement, la participation économique et l'inclusion sociale. Il convient de tenir compte des droits de l'homme et de la démocratie à chaque étape du processus décisionnel de la politique étrangère.

L'action extérieure de l'UE doit respecter les droits définis dans la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, qui a acquis le statut d'acte de l'UE juridiquement contraignant en vertu du traité de Lisbonne, ainsi que les droits garantis par la Convention européenne des droits de l'homme.

Pour promouvoir ces principes, l'UE doit revoir ses mécanismes, ses processus et ses structures de mise en œuvre. Des mesures doivent être prises dans plusieurs domaines, notamment en ce qui concerne:
– les mécanismes de mise en œuvre sur le plan externe: une approche ascendante, élaborée sur mesure, adaptée aux besoins de chaque pays, combinée avec une approche transversale sous forme de campagnes sur des thèmes précis, menées au niveau mondial, ne permettrait-elle pas d'obtenir de meilleurs résultats par rapport aux objectifs fixés dans le domaine des droits de l'homme et de la démocratie?
– les processus: comment l'UE peut-elle agir de manière plus concertée dans l'ensemble de ses politiques et dans ses institutions ainsi que dans ses relations extérieures avec des partenaires internationaux, des ONG, des groupements régionaux et des organisations internationales?
– les structures internes: faut-il en priorité achever la constitution d'un réseau de points focaux sur les droits de l'homme et la démocratie dans les délégations de l'UE du monde entier et doter le Conseil de compétences permanentes dans ces domaines?


A. REVISION DE LA MISE EN ŒUVRE: POUR UNE ACTION EFFICACE ET SUR MESURE



Maximiser l'impact sur le terrain grâce à des approches ad hoc



L'approche adoptée traditionnellement par l'UE pour sa stratégie en matière de droits de l'homme est une approche descendante («top-down»): elle définit les priorités mondiales à Bruxelles, puis s'efforce de les appliquer par l'intermédiaire de dialogues et de réunions politiques menées avec les pays tiers. Cependant, même si les principes et les objectifs sont universels, les priorités immédiates, et par conséquent les modalités et les calendriers de mise en œuvre, peuvent et doivent varier d'un pays à l'autre.
Ainsi, bien que les objectifs globaux de l'UE en matière de droits de l'homme et de démocratie restent valables et inchangés, une approche qui vise à faire correspondre les objectifs concernant un pays aux réalités du terrain a plus de chances de donner des résultats qu'une approche unique pour tous. Des stratégies en matière de droits de l'homme et de démocratie élaborées sur mesure pour un pays devraient donc faire partie intégrante de la stratégie globale de l'UE à l'égard de ce pays. Elles contribueraient à hiérarchiser et à rationaliser le travail, en particulier dans les délégations de l'UE et les ambassades des États membres, tout en tirant mieux parti de la combinaison d'outils et d'instruments fournis par l'UE et en se concentrant sur les domaines dans lesquels les améliorations et les changements sont le plus susceptible d'être durables. Cela ne signifie en aucun cas que l'UE doit s'abstenir, par exemple, de condamner la peine de mort dans un pays qui continue de l'appliquer, mais simplement que cela ne devrait pas être le seul et unique objet de son action dans le domaine des droits de l'homme lorsque des changements pourraient être obtenus sur d'autres questions.

L'UE est en train d'élaborer des stratégies en matière de droits de l'homme pour plus de 150 pays (l'objectif étant, à terme, de couvrir tous les pays). Celles-ci devraient lui permettre d'individualiser son approche et d'exercer une plus grande influence sur le terrain. Les stratégies par pays visent à rassembler les ressources des délégations de l'UE et des missions diplomatiques de ses États membres sur le terrain. Elles établissent les priorités et les objectifs propres à chaque pays, qui peuvent être intégrés dans toutes les politiques extérieures de l'UE pertinentes, telles que le développement, le commerce ou la sécurité, et s'inscrire ainsi dans les relations politiques et économiques globales que l'UE entretient avec un pays donné. Elles sont élaborées en tenant compte du point de vue de la société civile.

L'UE devrait veiller à ce qu'il soit tenu compte des stratégies par pays en matière de droits de l'homme lors de l'organisation de dialogues, de l'élaboration des stratégies, de la programmation et de la mise en œuvre de l'aide financière aux pays tiers, y compris dans les documents de stratégie par pays après 2013.

Comment progresser sur des thèmes transversaux grâce à une approche axée sur des campagnes



Outre les stratégies adaptées à chaque pays, l'UE devrait définir des thèmes transversaux pour lesquels elle pourrait utiliser son influence collective en menant des campagnes ciblées et limitées dans le temps. Le long travail de soutien en faveur de la Cour pénale internationale (CPI) et l'abolition de la peine de mort en sont de bons exemples. Ces campagnes devraient faire l'objet d'une action collective réunissant toutes les institutions de l'UE et les différents États membres.

La haute représentante a proposé de cibler trois thèmes pour les trois prochaines années:
– réforme des systèmes judiciaires, axée sur le droit à un procès équitable;
– droits des femmes, en s'appuyant sur l'approche globale adoptée par l'UE en ce qui concerne les femmes, la paix et la sécurité ainsi que sur la stratégie de l'UE en matière d'égalité entre hommes et femmes;
– droits de l'enfant, sur la base du «programme de l'Union européenne en matière de droits de l'enfant» et des deux séries de lignes directrices de l'Union européenne sur les enfants.

Les institutions européennes et les États membres de l'UE devraient participer à la définition d'objectifs spécifiques, mesurables, réalisables, réalistes et limités dans le temps et à l'élaboration de plans de mise en œuvre pour chaque campagne.

Nouvelle approche avec les pays voisins et au-delà



Dans le cadre de la récente révision de la politique européenne de voisinage, les politiques de l'UE en faveur de la démocratie ont été développées davantage. La nouvelle approche est fondée sur une obligation mutuelle de rendre des comptes et un engagement accru en faveur des valeurs universelles des droits de l'homme, de la démocratie et de l'État de droit, et notamment d'un dialogue stratégique renforcé dans ce domaine. Elle a introduit deux notions: l'«approfondissement de la démocratie», qui vise à établir des critères de référence à l'aune desquels les progrès pourront être évalués, et le principe «more for more», selon lequel les pays désireux de faire de réels progrès sur la voie de la démocratie pourront compter sur des fonds supplémentaires dans le domaine de la coopération. Le pendant inverse de ce principe devrait également s'appliquer. Les partenariats avec la société civile seront renforcés et un soutien financier supplémentaire sera mis à disposition, notamment au moyen d'un nouveau mécanisme de financement spécifique.

Travailler en partenariat avec la société civile



L'UE doit travailler en étroite collaboration avec la société civile et tirer parti du savoir-faire et des canaux de communication différents utilisés par celle-ci. Il convient de développer le dialogue mené de longue date entre fonctionnaires, ONG, entreprises, organisations syndicales et médias. L'UE devrait continuer à soutenir les sociétés civiles dynamiques, essentielles aux États démocratiques, ainsi que les partenaires sociaux, indispensables à la durabilité des réformes. Même dans les cas où il y a peu, voire aucune perspective réaliste de nouer un véritable dialogue avec un gouvernement, il ne devrait pas en résulter une diminution des contacts avec la population de ce pays. Il est alors d'autant plus nécessaire que l'UE collabore avec la société civile et l'opposition politique pacifique et qu'elle apporte son soutien aux défenseurs des droits de l'homme lorsqu'ils sont exposés et menacés. L'UE devrait continuer à s'exprimer sur des cas précis touchant aux droits de l'homme et à des violations en la matière ainsi qu'au recul de la démocratie, en veillant en particulier à préserver ou à créer les conditions nécessaires au bon développement de la société civile.

L'UE a adopté une approche consistant à mener des consultations systématiques avec les ONG internationales et locales actives dans le domaine des droits de l'homme dans tous les aspects de sa politique en la matière. Un soutien particulier sera apporté dans les pays tiers aux conditions susceptibles de permettre à la société civile d'agir librement. Le forum annuel UE-ONG sur les droits de l'homme devrait continuer d'examiner l'action de l'UE et de contribuer à celle-ci.

Les défenseurs des droits de l'homme sont des alliés indispensables de l'UE pour la promotion et de la protection des droits de l'homme dans le monde entier et sont considérés comme des interlocuteurs de premier plan pour les délégations de l'UE et dans le cadre des missions diplomatiques menées par les États membres de l'UE dans des pays tiers. L'UE devrait continuer d'apporter son soutien à la mise en œuvre effective des orientations de l'UE concernant les défenseurs des droits de l'homme, en menant des actions de sensibilisation auprès de tous les acteurs concernés. Elle devrait continuer à répondre aux besoins urgents de protection des défenseurs des droits de l'homme directement menacés, notamment au moyen d'un programme d'hébergement d'urgence mis en place au niveau de l'UE. Le soutien politique fourni aux défenseurs des droits de l'homme est complété par une aide financière spéciale de l'instrument européen pour la démocratie et les droits de l'homme (IEDDH), qui tient compte des obstacles particuliers auxquels ces personnes se heurtent dans leur travail quotidien.

L'IEDDH, doté de 1,1 milliard d'EUR pour la période 2007-2013, reflète l'engagement de l'UE à promouvoir et à soutenir la démocratie et les droits de l'homme, en fournissant un soutien aux institutions de la société civile et des droits de l'homme dans le monde entier. La Commission a proposé de porter la dotation à 1,4 milliard d'EUR (prix de 2011) pour le prochain cadre financier pluriannuel 2014-2020.

Dans le contexte du cadre financier pluriannuel, il sera proposé de rendre l'IEDDH plus flexible, de manière à obtenir de meilleurs résultats plus rapidement et en plus grand nombre, permettant ainsi à davantage d'organisations d'avoir accès à des fonds et apportant une réponse rapide aux besoins de la société civile dans les pays confrontés aux situations les plus urgentes et les plus difficiles.

B. UNE APPROCHE CONCERTEE VIS-A-VIS DES POLITIQUES



L'UE est résolue à placer les droits de l'homme et la démocratie au cœur de son action extérieure, en tant que fil conducteur de tout ce qu'elle entreprend. Le traité sur l'Union européenne précise que les droits de l'homme et la démocratie sont des principes directeurs pour l'ensemble des actions de l'UE. Il est possible d'agir de manière plus concertée à travers toute la série de politiques de l'UE de façon à ce que, conjointement, elles produisent un effet maximal.

Diverses politiques de l'UE ayant une dimension extérieure sont clairement en rapport avec les droits de l'homme et la démocratie, notamment celles relatives à la coopération au développement, aux échanges commerciaux, à la liberté, à la sécurité et à la justice, à la lutte contre le terrorisme, à la gestion des crises, à la prévention des conflits et à la gouvernance de l'internet.

Toutes les actions élaborées dans le cadre de ces politiques (y compris les mesures prises par les États membres pour les mettre en œuvre dans leurs domaines de compétence respectifs) doivent demeurer pleinement compatibles avec le respect, la protection et la promotion des droits de l'homme.

Démocratie et élections



Sur le plan du soutien à la démocratie, l'UE et ses États membres ont un attachement fort à la démocratie, qui est inscrit dans les traités et constitutions et s'appuie sur des traditions parlementaires solidement ancrées. En 2009, l'UE a adopté une stratégie et un programme d'action pour le soutien à la démocratie dans le cadre de son action extérieure. Celui-ci préconisait une plus grande cohérence des politiques et une coordination accrue entre les instruments utilisés, dans l'esprit du traité de Lisbonne.

Les élections revêtent un aspect crucial dans plusieurs domaines des droits de l'homme comme la liberté d'expression, de réunion et d'association. L'UE joue un rôle primordial dans le soutien électoral et aide les pays partenaires à mettre en place des processus électoraux crédibles, transparents et ouverts à tous. Elle dispose en outre d'un instrument important, à savoir ses 3missions d'observation électorale (MOE). Les recommandations formulées par celles-ci représentent une contribution très utile à la poursuite du soutien aux droits de l'homme et à la démocratie dans le pays concerné. Dans ce contexte, l'UE accordera une plus grande attention à la participation des femmes et des membres de minorités nationales ainsi que des personnes handicapées, à la fois comme candidats et électeurs. L'instauration de synergies entre le soutien électoral et l'observation des élections constitue un élément très important de la stratégie de l'UE. Celle-ci exploitera activement les rapports des missions d'observation électorale.

Les élections ne peuvent à elles seules garantir la survie de la démocratie. L'approche de l'UE à l'égard de la démocratie devrait créer des synergies entre le soutien direct accordé au processus électoral, à la classe politique (parlements et partis politiques, société civile et médias) et l'appui fourni aux autres éléments essentiels pour la consolidation d'un État, à savoir l'État de droit, le pouvoir judiciaire, la réforme de l'administration publique et la décentralisation.

L'UE est en train de renforcer la mise en œuvre de son programme d'action pour le soutien à la démocratie. En effet, elle a constitué un premier groupe de pays pilotes en utilisant la composante «démocratie» de l'IEDDH et en s'efforçant d'utiliser de manière plus cohérente les instruments politiques et financiers dans son approche globale du soutien à la démocratie à l'échelle mondiale. Les réactions de l'UE face à l'évolution récente de la situation en Afrique du Nord se sont appuyées sur les initiatives prises dans le cadre de la révision de la politique européenne de voisinage, après avoir élaboré une méthodologie destinée à soutenir les réformes propices à l'avènement d'une démocratie durable. Pour ce faire, il y a lieu d'appliquer des mesures d'incitation positives ou négatives, selon le cas, et d'établir des critères de référence permettant d'évaluer les progrès accomplis sur les plans des droits de l'homme, de la démocratie et de l'État de droit.

Coopération au développement



Les actions à mener dans les domaines des droits de l'homme et de la coopération au développement sont étroitement liées. Le respect des droits de l'homme est indispensable à la réalisation pleine et entière des objectifs du millénaire pour le développement (OMD). L'Union s'attache, depuis longtemps, à ce que le respect des droits de l'homme et du développement démocratique soit placé au cœur de toutes les actions de coopération au développement. Cela peut se faire en garantissant la transparence dans la prise de décision, afin de permettre la pleine participation des femmes et des groupes marginalisés, et d'éviter par là même de contribuer au renforcement de leur exclusion. Il convient de veiller à ce que les programmes et projets de développement financés par l'UE contribuent à faire en sorte que les pays partenaires s'acquittent de leurs obligations internationales en matière de droits de l'homme, y compris les recommandations formulées par les organes des Nations unies au cours de l'examen périodique universel et par d'autres organismes de contrôle, comme l'OIT. Il est essentiel de jeter des ponts entre droits de l'homme, démocratie et développement pour progresser dans des domaines aussi divers que l'accès à l'eau et aux installations d'assainissement et la sécurité alimentaire.

La communication récente intitulée «Accroître l'impact de la politique de développement de l'UE: un programme pour le changement» met en évidence le défi consistant à mieux soutenir les efforts déployés par les pays partenaires pour respecter leurs obligations nationales et internationales en matière de droits de l'homme. L'UE est résolue à faire en sorte que le bilan d'un pays sur les plans des droits de l'homme, de la démocratie et de l'État de droit ait un effet plus direct sur la programmation, les modalités et les canaux de l'aide, ainsi que sur la révision de l'appui budgétaire direct.

Lors de l'évaluation des contrats conclus dans le cadre de l'appui budgétaire direct, le soutien à l'instauration d'une démocratie profonde et durable et aux droits de l'homme peut être assorti de conditions spécifiques, dans le droit fil de la communication de la Commission intitulée «La future approche de l'appui budgétaire de l'UE en faveur des pays tiers».

Des stratégies nationales en matière de droits de l'homme et une approche fondée sur les droits de l'homme devraient garantir que les droits de l'homme et la démocratie se reflètent dans l'ensemble du processus de coopération au développement et assurer la continuité entre le dialogue politique et stratégique concernant les questions de droits de l'homme et la coopération au développement.

Clauses relatives aux droits de l'homme



Depuis 1995, l'UE insère une clause relative aux droits de l'homme dans les accords-cadres politiques conclus avec les pays tiers. Elle a réaffirmé cette politique en 2010. Une telle clause figure désormais dans les accords conclus avec plus de 120 pays et d'autres sont en cours de négociation. Cette clause constitue le fondement de la coopération en matière de droits de l'homme et de la promotion des droits de l'homme dans tous les domaines couverts par ces accords. Elle forme également la base juridique des mesures prises à la suite de violations des droits de l'homme. Ces mesures peuvent aller jusqu'à la suspension des réunions et des programmes de coopération technique avec le pays concerné.

Politique commerciale



La politique commerciale commune est l'une des manifestations les plus visibles de l'action extérieure de l'UE. L'action à mener par l'Union dans les domaines du commerce et des droits de l'homme doit être cohérente, transparente, prévisible, viable et efficace. Le défi consiste à assurer le fonctionnement du commerce d'une façon qui fasse progresser la question des droits de l'homme, au lieu de l'entraver.

L'approche de l'UE concernant sa politique commerciale est axée sur l'utilisation de mesures d'incitation positives et le recours à des préférences commerciales pour promouvoir les droits de l'homme, parallèlement à un processus de dialogue sur les conditions du maintien de ces préférences. Les partenaires commerciaux de l'UE étant très différents, la manière de garantir la cohérence avec les objectifs en matière de droits de l'homme doit refléter cette diversité. Une expression de cette approche est le système de préférences généralisées plus (SPG+), accordant des préférences supplémentaires aux pays qui s'engagent à adopter les valeurs universelles fondamentales dans les domaines des droits de l'homme, des droits du travail, de l'environnement et de la gouvernance. Les accords de libre-échange de l'UE sont liés à ses accords-cadres politiques (voir le paragraphe précédent sur les «Clauses relatives aux droits de l'homme»); la situation des droits de l'homme dans le pays partenaire devrait être prise en compte lorsque l'UE décide s'il y lieu ou non d'entamer ou de conclure des négociations relatives à un accord de libre-échange.

Le traité de Lisbonne prévoit de nouvelles compétences en ce qui concerne la politique d'investissement; la politique commune d'investissement de l'UE devrait être guidée par les principes et objectifs de l'action extérieure de l'Union, notamment en matière de droits de l'homme.

Il est également recouru à des mesures commerciales spécifiques pour soutenir les objectifs ayant trait aux droits de l'homme. On peut citer, par exemple, le règlement (CE) n° 428/2009 relatif au contrôle des exportations de biens à double usage, le règlement (CE) n° 1236/2005 concernant le commerce de biens susceptibles d'être utilisés en vue d'infliger la peine capitale ou la torture et la position commune 2008/944/PESC du Conseil sur les exportations d'armes.

Technologies de l'information et des communications



L'évolution des technologies de l'information et des communication (TIC) telles que l'internet, la téléphonie mobile et les médias sociaux recèle un immense potentiel dès lors qu'il s'agit de promouvoir les droits de l'homme, comme la liberté d'expression et de réunion. La circulation à l'échelon international de flux d'informations peut réellement donner des moyens d'action à la société civile et aux défenseurs des droits de l'homme. Dans le même temps, ces progrès technologiques sont toutefois susceptibles de renforcer la position des États autoritaires en augmentant leurs possibilités de surveillance et de censure. On constate actuellement une absence de normes claires pour les entreprises européennes en ce qui concerne la vente de technologies de ce type aux régimes autoritaires, ainsi que la prestation de services ex post, telles que la formation et le conseil. Dans ce contexte, le SEAE et les services compétents de la Commission envisageront l'élaboration de mesures propres à garantir que les personnes ne font pas l'objet d'une censure aveugle ou d'une surveillance de masse lorsqu'elles utilisent l'internet ou d'autres technologies de l'information et des communications et peuvent mettre à profit tout leur potentiel pour défendre les droits de l'homme – la protection de la vie privée et des données à caractère personnel étant également prise en compte.

Entreprises et droits de l'homme



La responsabilité sociale des entreprises (RSE) permet à ces dernières d'intégrer de leur plein gré des préoccupations sociales et environnementales dans leur activité économique et dans leurs relations avec leurs partenaires. Il convient d'encourager les entreprises européennes à faire preuve de toute la diligence requise pour faire en sorte que leurs activités respectent les droits de l'homme, quel que soit l'endroit où elles se déroulent.

Si la mondialisation donne aux entreprises davantage de possibilités de contribuer au respect des droits de l'homme, elle engendre également des risques accrus de participation des entreprises à des atteintes aux droits de l'homme. L'UE a accueilli avec satisfaction les principes directeurs des Nations unies relatifs aux entreprises et aux droits de l'homme, qui ont été approuvés à l'unanimité par le Conseil des droits de l'homme de l'ONU en juin 2011. La Commission européenne a publié une communication sur la responsabilité sociale des entreprises en octobre 2011. Dans cette communication, elle déclare attendre de toutes les entreprises qu'elles assument la responsabilité qui leur incombe de respecter les droits de l'homme, conformément aux principes directeurs des Nations unies. Sur la base de cette communication, la Commission élaborera, entre autres, des orientations relatives aux droits de l'homme à l'intention des petites et moyennes entreprises, invitera les États membres à établir leurs propres plans nationaux de mise en application des principes directeurs des Nations unies et continuera à encourager les pays partenaires à respecter les normes RSE internationalement reconnues, telles que les principes directeurs de l'OCDE à l'intention des entreprises multinationales et la déclaration de principes tripartite de l'OIT sur les entreprises multinationales et la politique sociale.

Prévention des conflits



Les violations des droits de l'homme, le manque de libertés fondamentales et une culture d'impunité largement répandue – en particulier dans les situations délicates – provoquent ou aggravent l'instabilité politique et les conflits violents.

L'UE renforcera encore l'attention portée à la situation des droits de l'homme et au respect des libertés fondamentales dans le cadre de son analyse des risques de conflits et de ses systèmes d'alerte précoce. Elle devrait également poursuivre et intensifier ses efforts visant à placer les droits de l'homme et les libertés fondamentales au cœur de ses activités de prévention des conflits et de consolidation de la paix. Le cas échéant, elle traduira son analyse et son alerte précoce en possibilités d'action rapide.

Gestion des crises



Les missions et opérations de gestion de crise de l'UE fonctionnent en étroite interaction avec les forces locales, souvent dans un contexte de conflit, et bon nombre d'entre elles sont confrontées à des violations des droits de l'homme. Depuis la première opération de gestion de crise menée par l'UE en 2003, de bonnes pratiques ont été recensées concernant l'intégration des droits de l'homme et des questions d'égalité hommes-femmes dans la planification et la mise en œuvre. L'UE alignera ses pratiques sur les meilleures pratiques internationales en matière de planification, de formation et de déploiement, conformément à l'approche interinstitutions des droits de l'homme suivie par les Nations unies dans ses opérations de maintien de la paix.

L'UE renforcera les volets «droits de l'homme», «protection de l'enfance» et «égalité hommes-femmes» dans ses efforts de prévention des conflits, de gestion de crise et de consolidation de la paix, à la lumière des meilleures pratiques internationales et dans la perspective d'une issue démocratique, la violence étant remplacée par des mécanismes de résolution politique des conflits.

L'application de l'Approche globale pour la mise en œuvre, par l'Union européenne, des résolutions 1325 et 1820 du Conseil de sécurité des Nations unies sur les femmes, la paix et la sécurité, ainsi que des lignes directrices sur les violences contre les femmes et la lutte contre toutes les formes de discrimination à leur encontre sera intégrée dans la politique des droits de l'homme de l'UE, y compris dans le rapport annuel.

La mise en œuvre des lignes directrices concernant le droit humanitaire international sera également intensifiée.

Lutte contre le terrorisme



Les activités de lutte contre le terrorisme doivent être menées dans le strict respect des droits fondamentaux et du droit international. Cela comprend la législation en matière de droits de l'homme, le droit humanitaire international, le droit international des réfugiés, l'existence de procédures judiciaires libres et équitables ainsi que la protection des données à caractère personnel et privé. Dans ses dialogues sur les droits de l'homme avec les pays tiers, l'UE soulève déjà la question des violations des droits de l'homme commises sous le couvert d'activités de lutte contre le terrorisme. Il est toutefois possible d'intensifier la discussion à ce sujet avec les pays tiers dans les dialogues consacrés à la coopération en matière de lutte contre le terrorisme. L'UE met ces dialogues à profit pour inviter les pays tiers à ratifier les conventions et les protocoles des Nations unies relatifs à la lutte contre le terrorisme. Les droits de l'homme devraient être ancrés plus solidement dans la planification et la mise en œuvre de projets d'assistance à des pays tiers dans le domaine de la lutte contre le terrorisme.

Liberté, sécurité et justice



Dans la dimension extérieure de la liberté, de la sécurité et de la justice – y compris la coopération policière et judiciaire, la lutte contre la drogue et la criminalité organisée, le fonctionnement et l'indépendance du pouvoir judiciaire, la gestion des frontières, la traite des êtres humains, la mobilité, l'asile et la migration, la protection des droits fondamentaux est de la plus haute importance. Lors de la mise en place d'une coopération avec des pays tiers dans ces domaines, il est essentiel de veiller à ce que les pratiques respectent pleinement les droits de l'homme, et notamment le principe de non-discrimination. Par exemple, si des informations sont échangées avec les forces de police de pays tiers, ces informations ne peuvent pas avoir été obtenues sous la torture ou par des traitements inhumains et des mesures de protection adaptées doivent exister.

Un meilleur respect des droits de l'homme, notamment dans le cas des migrants dans les pays d'origine, de transit et de destination, est également au cœur des préoccupations de l'approche globale de la question des migrations et de la mobilité, qui établit la politique migratoire extérieure de l'UE. Il conviendrait d'accorder une attention particulière à la protection et à l'autonomisation des migrants vulnérables, tels que les mineurs non accompagnés, les demandeurs d'asile, les apatrides et les victimes de la traite des êtres humains.

La traite des êtres humains revêt un intérêt particulier pour le présent domaine. Il est important de s'assurer que la lutte contre la criminalité/la sécurité et les droits de l'homme sont appréhendés comme des aspects complémentaires du même problème et que les causes profondes de la traite des êtres humains sont également abordées. Il est en particulier indispensable de protéger les femmes contre les violences à caractère sexiste et de lutter contre la féminisation de la pauvreté. L'UE continuera d'axer son action extérieure en priorité sur la traite des êtres humains. Le financement accordé en faveur de ce domaine ainsi que les formations organisées et les échanges d'informations traduiront la priorité accordée à ce problème et redépassera la dimension extérieure de la liberté, de la sécurité et de la justice. Le coordinateur européen de la lutte contre la traite des êtres humains et le SEAE ont déjà établi des contacts afin de dresser la liste des régions et pays avec lesquels il conviendra de conclure en priorité de futurs partenariats dans ce domaine.

En ce qui concerne la gestion des frontières, l'UE soutient activement l'intégration des aspects relatifs aux droits de l'homme dans la mise en place de mesures de contrôle efficaces aux frontières des pays tiers. Il est en particulier primordial que la police des frontières soit dotée des moyens adaptés et correctement formée pour être en mesure d'aider les personnes ayant besoin de protection et qui se présentent spontanément aux frontières et de les orienter vers les procédures adéquates.

Cohérence totale entre les politiques



Il est essentiel que l'UE montre l'exemple quant au respect des droits fondamentaux, non seulement pour les personnes vivant sur son territoire mais également pour le développement même de l'Union. La solidité du bilan renforcera l'action internationale de l'UE en faveur des droits de l'homme.

Le traité de Lisbonne a fait de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne un document juridiquement contraignant. Elle doit être respectée de la même manière par l'ensemble des institutions, organes, offices et agences de l'UE ainsi que par les États membres, lorsqu'ils mettent en œuvre le droit de l'Union. L'obligation de l'UE de respecter les droits de l'homme implique non seulement l'obligation générale de s'abstenir d'actes portant atteinte à ces droits, mais aussi d'en tenir compte dans la conduite de ses propres politiques, tant sur le plan intérieur qu'extérieur.

En octobre 2010, la Commission a adopté une stratégie pour la mise en œuvre effective de la Charte des droits fondamentaux, qui explique comment les institutions et les États membres de l'UE doivent appliquer cette dernière. Cette stratégie a été bien accueillie par le Parlement européen et le Conseil de l'UE. La Commission publiera tous les ans un rapport sur les progrès accomplis. Le premier rapport sur la mise en œuvre de la Charte par les institutions européennes a été publié en mars 2011.

L'engagement pris par l'UE d'adhérer à la Convention européenne des droits de l'homme vient renforcer l'importance déjà accordée dans l'ordre juridique de l'Union à la protection des droits de l'homme par l'intermédiaire de la Charte des droits fondamentaux de l'UE et de la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne.

Ces politiques de l'UE revêtent de l'importance pour la crédibilité de l'Europe, dès lors qu'il s'agit de soulever la question des droits de l'homme avec d'autres pays. Lorsque l'UE aborde cette question avec des pays tiers, elle s'appuie sur des normes internationales: il s'agit principalement des grands traités de l'ONU relatifs aux droits de l'homme et des normes fondamentales du travail ainsi que (pour les partenaires européens) des normes du Conseil de l'Europe et de l'OSCE. Il importe que l'UE et ses États membres appliquent ces normes de façon visible et efficace dans les domaines de compétence qui leur incombent.

C. METTRE EN PLACE DES PARTENARIATS ETROITS


Coopération multilatérale



L'UE doit établir un socle commun avec les pays partenaires si l'on veut que les Nations unies prennent des mesures vigoureuses. Ces dernières années, elle s'est employée à renforcer les capacités du Conseil des droits de l'homme, à Genève, et de la troisième commission de l'Assemblée générale des Nations unies en vue d'arrêter et de faire respecter des normes et des règles dans le domaine des droits de l'homme universels et de réagir en cas de graves violations des droits de l'homme. Cette démarche a permis quelques réussites notables, notamment d'obtenir un soutien, au niveau mondial, en faveur d'un moratoire sur la peine de mort, ou de parvenir à un consensus sur des initiatives liées à la liberté de religion ou de croyance.

Le succès de cette démarche dépend, dans une large mesure, de la capacité de l'UE à élaborer des actions de sensibilisation, à être réceptive à ses partenaires des pays tiers ainsi qu'à s'engager dans des coalitions transrégionales, en faisant jouer ses relations bilatérales. L'Union européenne doit renforcer sa capacité à arrêter des positions communes et à parler d'une seule voix, en s'appuyant sur le poids cumulé et les ressources des États membres dans le cadre de la répartition des charges et en adoptant une approche plus stratégique pour établir ses priorités. Il est indispensable de renforcer les synergies et la coordination entre Genève, New-York et Bruxelles; cela vaut également pour l'action de l'UE dans d'autres structures multilatérales, telles que le Conseil de l'Europe et l'OSCE.

L'UE devrait s'efforcer d'accroître son efficacité au sein des Nations unies pour renforcer les coalitions transrégionales, soutenir les mécanismes des droits de l'homme existant dans le système des Nations unies et favoriser une meilleure synchronisation avec ses actions au niveau bilatéral et dans d'autres enceintes multilatérales. Elle élaborera une approche annuelle pour déterminer les priorités aux Nations unies pour toutes les réunions organisées à Genève et à New-York en matière de droits de l'homme, conformément aux priorités définies à mi- parcours pour son action dans le cadre de cette organisation.

Justice internationale



L'UE est pleinement déterminée à promouvoir la justice internationale – en luttant contre l'impunité et en favorisant l'établissement d'un ordre international qui repose sur la loi ainsi qu'en empêchant que soient commis des génocides, des crimes contre l'humanité et des crimes de guerre et en rendant les auteurs de ces crimes comptables de leurs actes. Elle continuera à plaider pour l'obligation de rendre des comptes en cas de violation du droit international humanitaire et des droits de l'homme. Elle entend maintenir une aide importante à la Cour pénale internationale ainsi qu'à d'autres tribunaux pénaux internationaux et militer en faveur de la ratification universelle du Statut de Rome. L'Union européenne s'est pleinement engagée à soutenir l'universalité et l'intégrité du statut de Rome de la Cour pénale internationale et l'indépendance de celle-ci. Elle est également déterminée à donner plein effet au statut de Rome grâce à l'application du principe de complémentarité et au renforcement de liens fructueux entre les systèmes judiciaires nationaux et la CPI.

L'UE devrait élaborer une politique spécifique axée sur la justice de transition dans le cadre de son action extérieure pour aider les sociétés à lutter contre les dérives passées au moyen de dispositifs favorisant la justice, la recherche de la vérité, les réparations et la réforme institutionnelle.

Organisations régionales



L'UE renforcera sa coopération dans les domaines des droits de l'homme et de la démocratie avec les organisations intergouvernementales et régionales, au niveau tant politique que local, entre les délégations de l'UE et le siège, les antennes ou les missions de ces organisations. Elle fera plus systématiquement appel à sa coopération avec le Conseil de l'Europe et l'OSCE. L'UE devrait examiner les possibilités de renforcer sa coopération avec les pays de l'UA, de l'ANASE, de l'OEA et d'autres organisations, en s'appuyant sur les mécanismes régionaux en faveur des droits de l'homme et de la démocratie bien établis ou mis en place récemment. Elle devrait mettre à profit les dialogues qu'elle a instaurés avec différentes régions – notamment ASEM, UE-ALC, UA-UE et ACP – pour renforcer la coopération en matière de droits de l'homme.

L'UE devrait continuer à agir en faveur des droits de l'homme, de la démocratie et de l'État de droit dans le monde arabe et au-delà, grâce à une coopération plus étroite avec d'autres organisations, tels que la Ligue des États arabes et l'OCI.

Impact du dialogue



Les droits de l'homme et la démocratie font partie intégrante du dialogue entre l'UE et d'autres pays, jusque dans les réunions au sommet. Alors que l'UE a engagé quelque 40 dialogues et consultations sur les droits de l'homme, les meilleurs résultats sont atteints lorsque ces démarches sont fermement ancrées dans le tissu plus large des relations de l'Union avec un pays donné.

À la lumière de l'expérience acquise, l'UE devrait prendre un certain nombre de mesures pour rendre ces dialogues plus efficaces, à savoir:
– établir un lien plus étroit entre les droits de l'homme et divers moyens d'action;
– fixer des priorités, des objectifs et des critères de référence pour ces dialogues afin qu'ils puissent être réexaminés en liaison avec les stratégies par pays afférentes aux droits de l'homme;
– généraliser les meilleures pratiques à travers les divers cadres de dialogue sur les droits de l'homme, y compris les dialogues engagés à l'échelon local avec les pays ACP dans le cadre de l'accord de Cotonou (article 8);
– examiner les possibilités de renforcer le dialogue et la coopération avec les partenaires stratégiques de l'UE.

Réaction en cas de graves violations des droits de l'homme



Dans certains cas, l'Union européenne prend des mesures (par exemple, gel des avoirs, embargos sur les armes ou interdictions de visa) pour sanctionner de graves violations des droits de l'homme dans les pays tiers. Ces mesures font invariablement l'objet d'un examen particulier, conformément aux «principes de base concernant le recours aux mesures restrictives» adoptés en 2004 et à la charte européenne des droits fondamentaux.

Les mesures restrictives sont réexaminées régulièrement par le Conseil de l'UE. Il est important qu'elles contribuent à l'objectif déclaré, qu'elles soient ciblées, qu'elles n'aient pas d'effet négatif pour les populations civiles et qu'elles répondent aux exigences de clarté et d'équité des procédures, y compris le droit à un recours effectif.

D. TIRER PARTI DU POIDS COLLECTIF DE L'EUROPE



L'Union européenne doit renforcer ses mesures en faveur des

Parlement européen



Le Parlement européen a inscrit les droits de l'homme et la démocratie au premier rang de ses priorités. En se positionnant de façon systématique et rapidement sur les principaux dossiers d'actualité, il joue un rôle de premier plan dans la promotion des droits de l'homme à l'échelon de l'UE. Sa coopération avec d'autres parlements (par l'intermédiaire de ses commissions de coopération parlementaires et de ses délégations auprès des assemblées parlementaires régionales) est particulièrement précieuse pour renforcer les signaux de l'UE. Le Parlement européen pourrait intensifier utilement les efforts qu'il déploie de manière à diffuser son message essentiel sur les droits de l'homme au-delà de la sous-commission chargée des droits de l'homme pour qu'il parvienne à ses délégations dans les pays tiers.

États membres



Il est indispensable de faire jouer le poids collectif des institutions et des États membres de l'UE pour que les efforts consentis à cet échelon en faveur de la promotion et la protection des droits de l'homme et de la démocratie soient plus efficaces et plus crédibles. Les États membres doivent continuer à faire preuve d'une grande implication et de responsabilité en ce qui concerne la politique de l'UE en matière des droits de l'homme et de la démocratie, tant au niveau multilatéral que dans leurs relations bilatérales avec les pays tiers. Cela nécessite l'adoption de positions communes fortes sur les droits de l'homme, qui guident à la fois les institutions de l'UE et les États membres de l'UE pour leur permettre de s'exprimer d'une seule voix. Cela peut être facilité par l'organisation de débats réguliers sur les droits de l'homme au niveau politique également. Les États membres ont en outre un rôle important à jouer pour contribuer à la mise en œuvre de la politique de l'UE relative aux droits de l'homme et de la démocratie par l'intermédiaire de la répartition des charges et de la division du travail.

Capacités permanentes dans les domaines des droits de l'homme et de la démocratie au sein du Conseil de l'UE



Le groupe de travail du Conseil sur les droits de l'homme (COHOM) joue un rôle majeur dans le pilotage de la politique de l'UE relative aux droits de l'homme et au travers des conseils qu'il prodigue au COPS et au Conseil. Le COHOM, dont le personnel est mis à disposition par les États membres, se réunit actuellement une fois par mois et ne peut plus faire totalement face à l'augmentation de sa charge de travail et du volume des demandes qui lui sont adressées. La mise en œuvre effective de la politique extérieure de l'UE en matière de droits de l'homme exigerait des réunions plus fréquentes du COHOM et la mise à disposition de capacités permanentes et d'une expertise dans le domaine des droits de l'homme et de la démocratie dans les représentations permanentes des États membres de l'Union européenne à Bruxelles. L'existence, à Bruxelles, d'un groupe du COHOM permettrait de garantir une intégration plus étroite avec l'activité du Conseil, du COREPER et des divers groupes de travail thématiques ou géographiques du COPS. Cela permettrait également de concentrer les réunions mensuelles des directeurs chargés des droits de l'homme sur les aspects stratégiques de la politique de l'Union européenne en matière de droits de l'homme et de la démocratie, alors que le groupe de Bruxelles aurait pour mission d'examiner les questions en cours.

Instauration d'une culture des droits de l'homme et de la démocratie



Une direction des droits de l'homme et de la démocratie a été créée au sein du SEAE. D'une manière générale, il est entendu que les droits de l'homme non seulement relèvent de la responsabilité d'experts, mais qu'ils sont essentiels pour le travail de chacun. À cet effet, un point focal est désormais chargé des droits de l'homme dans toutes les délégations de l'Union européenne dans le monde; un réseau devrait être mis en place pour l'élaboration de campagnes transversales. Un réseau similaire de points focaux est actuellement mis en place au sein du SEAE et des services de la Commission.

Des actions de formation sur les droits de l'homme et la démocratie sont prévues pour tous les chefs de délégation ainsi que pour le personnel du SEAE et de la Commission.

La mise en place d'un réseau de points focaux chargés des droits de l'homme et de la démocratie va être menée à bien en utilisant les technologies les plus récentes pour le partage d'informations et des bonnes pratiques.

Repenser les canaux de communication de l'Union européenne



Partout dans le monde, les réseaux de médias sociaux fournissent une plate-forme aux défenseurs des droits de l'homme, par l'intermédiaire de laquelle ils se soutiennent mutuellement, se transmettent des informations et délivrent leur message à leurs sympathisants du monde entier. Ils leur permettent également de rendre compte de leur expérience personnelle, souvent en contournant les médias officiels. Il est plus difficile pour des régimes autoritaires de dissimuler les cas de violations des droits de l'homme et de subversion de la démocratie du fait de l'existence de la vidéo et de services de partage des messages. Dans le même temps, ces services peuvent être utilisés pour établir un profil plus précis des citoyens et les surveiller de plus près. Cette interconnexion – et la communauté de personnes nouvellement créée par l'intermédiaire des réseaux de médias sociaux – peut également permettre de réunir les responsables politiques et les citoyens aux fins d'un débat politique. Ainsi, des citoyens du monde entier peuvent discuter des droits de l'homme avec des personnalités politiques de l'UE et des représentants de ses pays partenaires par transmission vidéo en direct. De cette manière, les barrières hiérarchiques habituelles disparaissent, tout comme les obstacles empêchant d'accéder aux sphères politiques. Quiconque souhaite participer au débat doit simplement disposer d'un accès à Internet.

L'engagement auprès de différents groupes de la société au moyen de la diplomatie numérique constitue un moyen essentiel de faire mieux connaître les valeurs et l'action de l'Union européenne dans le monde entier. La diplomatie numérique de l'UE a considérablement évolué grâce à l'utilisation des médias sociaux, même si davantage doit être fait pour développer ces nouvelles techniques et exploiter le potentiel des délégations de la Commission dans le monde.

L'Union européenne pourrait encourager les principales délégations à recourir aux médias sociaux pour la diplomatie numérique en utilisant les ressources de communication qui existent. Elle apportera un soutien concret à celles qui se servent des médias sociaux pour renforcer l'engagement citoyen sur le terrain.

Étapes suivantes



L'Union européenne entend jouer un rôle moteur et dispose des moyens nécessaires pour défendre les droits de l'homme et soutenir la démocratie dans le monde entier.

La présente communication est destinée à contribuer au débat engagé dans les institutions européennes sur la mise en place d'une approche plus efficace et globale dans le domaine des droits de l'homme et de la démocratie. Elle invite à s'exprimer sur une série d'actions et de pistes envisageables. L'étape suivante devrait permettre d'intégrer ces éléments dans une approche concertée de l'UE grâce à des débats interinstitutionnels.

Pour faire le point des progrès accomplis dans la réalisation des objectifs définis dans la présente communication, l'UE présentera ses résultats dans son rapport annuel sur les droits de l'homme et la démocratie dans le monde. Cela devrait permettre à toutes les parties prenantes à la politique de l'Union européenne, y compris la société civile, d'évaluer l'impact de l'action de l'UE et de contribuer à la définition des priorités futures.

Le Conseil et le Parlement sont invités à réexaminer régulièrement ces résultats et à revoir les objectifs stratégiques de l'Union européenne après cinq ans.
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