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Le Pakistan veut exécuter un "espion" indien, fureur de New Delhi

dépêche de presse du 10 avril 2017 - Agence mondiale d'information - AFP
Pays :
Kulbhushan Sudhir Jadhav
Le Pakistan a annoncé lundi la condamnation à mort d'un Indien pour espionnage, verdict qui a déclenché la fureur de New Delhi et risque d'envenimer les tensions entre les deux puissance nucléaires ennemies.

L'homme identifié par l'armée comme étant Kulbushan Sudhir Jadhav - aussi connu sous le nom de Hussein Mubarak Patel - avait, selon Islamabad, été arrêté en mars 2016 dans la province pakistanaise instable du Baloutchistan.

Il a été condamné à mort par une cour martiale à huis-clos, ont annoncé les militaires lundi dans un communiqué.

"Aujourd'hui, le général (chef d'état-major) Qamer Javed Bajwa a confirmé sa condamnation à mort", a précisé le porte-parole de l'armée pakistanaise, sans préciser quand l'exécution aurait lieu.

New Delhi, qui a toujours démenti que l'homme soit un espion, a estimé qu'une telle exécution "sans considération pour les règles les plus élémentaires de droit et de justice" reviendrait à un "meurtre prémédité".

Assurant que son ressortissant a été "kidnappé" en Iran frontalier, l'Inde a qualifié le procès de M. Jadhav de "mascarade" et regretté que ses diplomates n'aient pu avoir accès au détenu malgré "13 demandes formelles".

Selon le communiqué militaire pakistanais, M. Jadhav a avoué à la cour avoir été chargé par l'agence indienne RAW (Research and Analysis Wing) d'"organiser des activités d'espionnage et de sabotage afin de déstabiliser" le Pakistan, en créant des troubles au Baloutchistan et dans la mégapole de Karachi.

Le procès à huis-clos de la cour martiale avait été gardé secret jusqu'à lundi, même au sein de l'armée, a indiqué une source militaire à l'AFP.

- Condamnation rare -

Immédiatement après son arrestation, M. Jadhav avait été présenté comme un agent de la RAW par les médias pakistanais. Ces derniers s'étaient empressés de diffuser une vidéo publiée par l'armée et présentée comme des aveux filmés.

Le suspect y déclarait avoir travaillé sous couverture au Pakistan pendant des années, sans que l'on sache s'il s'exprimait sous la contrainte.

L'Inde et le Pakistan s'accusent régulièrement d'envoyer des espions et il n'est pas rare qu'ils expulsent des diplomates accusés d'espionnage, notamment lorsque leurs relations se tendent.

Mais cela s'est rarement soldé par des condamnations à mort ces dernières années.

En 2013, un Indien condamné à la peine capitale au Pakistan avait été battu à mort par des co-détenus. Sarabjit Singh était dans le couloir de la mort depuis 16 ans.

En 1999, un autre ressortissant indien, Sheikh Shamim, avait été pendu dans une prison pakistanaise presque dix ans après avoir été arrêté selon la police en "flagrant délit" d'espionnage près de la frontière.

Les cas précédents ont majoritairement été jugés par des tribunaux civils.

Les relations entre l'Inde et le Pakistan se sont de nouveau détériorées après une attaque meurtrière en septembre contre une base militaire du côté indien du Cachemire, attribuée par New Delhi à un groupe islamiste basé au Pakistan, Jaish-e-Mohammed.

Depuis, des échanges de tirs transfrontaliers font regulièrement des victimes au Cachemire, divisé depuis l'indépendance en 1947 des deux pays qui en revendiquent chacun la totalité.

Pour l'expert pakistanais en sécurité Hassan Askari, la condamnation à mort "pourrait augmenter encore les tensions entre les deux pays". "L'armée a décrété un châtiment sévère (...) mais reste à voir si le Pakistan pourra faire face aux conséquences politiques et diplomatiques".

Les deux voisins se sont livré trois guerres depuis 70 ans, dont deux au sujet du Cachemire.

Le Baloutchistan, vaste province très pauvre dans le sud-ouest du Pakistan, est secoué depuis des années par une insurrection séparatiste qualifiée par l'armée de "terrorisme" alimenté par des pays ennemis comme l'Inde.
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